Jean-Marc Valkenaer sur Thierry Neuville: "Au départ, le RACB ne voulait pas de lui..."

Recalé la première année et même pas dans les 20 finalistes car il ne parlait quasi pas un mot de Français ou de Néerlandais, Thierry Neuville a refait le Ford RACB Rally Contest en 2008. Et cette fois, il est arrivé parmi les trois derniers candidats et l'a emporté. Mais si l'on en s'était tenu au verdict du jury du RACB au sein duquel on retrouvait notamment Koen Wijckmans et son futur manager Geoffroy Theunis, il n'aurait pas gagné. Et dieu seul sait si sa carrière aurait décollé de la même manière. A quoi cela tient tout de même ! Comme cela fait dix ans, qu'on dira qu'il y a prescription et que cela s'est heureusement bien terminé, on vous raconte.

«Les trois finalistes s'étaient retrouvés à Bruges sur la piste de la RACB Safety Academy, » raconte Jean-Marc Valkenaer, patron du Floral Racing organisant à l'époque le Fiesta Trophy et membre du jury du volant Ford soutenu par la fédération. « Il y avait un petit jump et au premier passage, Thierry casse un cardan. On répare, il repart et paf cette fois c'est un support de boîte qui rend l'âme. Il y avait deux clans dans le jury. D'un côté celui du RACB (avec Koen Wijckmans et Geoffroy Theunis) et de l'autre celui de Ford. Du côté de la fédération, c'était clair : Ils disaient qu'ils ne voulaient pas de Neuville car il ne respectait pas la mécanique. Du côté de chez nous, on avait tout de même constaté qu'il était le plus rapide. Quelqu'un a même dit en rigolant que notre voiture n'était peut-être pas assez solide pour lui. Mais il était impressionnant. Le temps que l'on répare, l'obscurité était tombée et l'on n'avait plus la possibilité de renvoyer les trois pilotes pour un ultime tour. On était donc pas d'accord, le ton est monté et je me souviens avoir appelé Jo Declerck, le responsable des relations publiques de Ford Belgique, pour lui expliquer la situation. Il m'a répondu que Floral et Ford mettaient plus de budget que le RACB et qu'on ne devait donc pas céder. Il a proposé de rejouer la finale trois jours plus tard. Finalement Koen a accepté, tout le monde est revenu le mercredi ou le jeudi et là, sur la piste Ford de Lommet, Thierry a collé deux secondes à Mathias Boon et à Julien Marmifero. Ouf... »

Le plus rapide, Neuville n'était pas encore totalement lancé car la saison 2008 ne s'est pas passée comme prévu. « Il a gagné plusieurs manches mais est aussi sorti plusieurs fois de sorte qu'il a terminé troisième du Fiesta Trophy, je pense derrière Xavier Baugnet et Anthony Martin, le lauréat de la première édition. Je me souviens qu'il avait continué après une sortie au Haspengouw. Il avait endommagé le radiateur et cassé le moteur. La franchise était à diviser en trois entre Ford, le RACB et le pilote. Mais il n'avait pas de budget. Un représentant de la fédération de l'époque a alors dit : il ne fera pas le Condroz pour récupérer l'argent de la franchise. Mais Thierry n'était pas d'accord. Alors il a débarqué un jour à l'atelier avec son père. Ils avaient trouvé des pièces dans une casse et ils ont travaillé jusqu'à 4 heures du matin pour remonter un autre moteur et être au départ du Condroz. Il avait ainsi gagné le respect de toute l'équipe.»

Durant cette épreuve, il y avait le fameux vote pour élire le pilote à envoyer un an chez M-Sport.«Les journalistes votaient aussi. On disait à ce moment-là que Thierry allait être managé par le grand dénicheur de talent Michel Lizin qui n'était visiblement pas très populaire auprès de ses confrères lesquels du coup ont majoritairement voté pour Mathias Boon. Lors du dépouillement, cela s'est joué à une voix. On était tous très déçus car on savait que Thierry était plus doué et surtout plus motivé que Mathias. On a de suite remarqué qu'il avait un coup de volant exceptionnel. Mais on n'a pas triché et respecté le verdict du vote. Je me suis toujours demandé comment aurait évolué sa carrière s'il avait passé l'année 2009 chez Malcolm Wilson... »