26 septembre 1993: Alain Prost décroche sa 4e et dernière couronne mondiale en F1
Il y a 25 ans, le 26 septembre 1993, Alain Prost, de retour après une année sabbatique, décrochait lors du GP du Portugal sa 4e couronne mondiale... mais annonçait sa retraite définitive fin de la saison
- Publié le 26-09-2018 à 15h37
- Mis à jour le 09-10-2018 à 10h10
Il y a 25 ans, le 26 septembre 1993, Alain Prost, de retour après une année sabbatique, décrochait lors du GP du Portugal sa 4e couronne mondiale avec Williams mais annonçait sa retraite définitive fin de la saison car il ne voulait plus affronter Ayrton Senna à armes égales en 1994. Il avait alors 38 ans...
À l’aube de la saison 1993, l’écurie Williams était au sommet de son art. Elle venait de réaliser le doublé en 1992 avec, en surclassement, le titre de champion du monde pour Nigel Mansell et celui de vice-champion pour Ricardo Patrese. Pour 1993, Mansell partit rouler aux Etats-Unis et Patrese émigra chez Benetton. Frank Willams les remplaça par Alain Prost qui, après une année sabbatique, revint dans le baquet d’une F1, avec le jeune Damon Hill comme équipier.
Alain Prost, triple champion du monde (1985, 1986 et 1989), retrouve donc les circuits après une année au garage. Remercié par Ferrari, le Français n'avait pas trouvé le volant en 1992. Le départ de Mansell lui offre une voiture au top, qu'il mène à la victoire dès le premier Grand Prix de la saison, en Afrique du Sud. Mais Prost doit partager les premiers lauriers de la saison avec son meilleur ennemi, Ayrton Senna. Le Brésilien lui en fait voir de toutes les couleurs au volant de sa McLaren, mais le pilote Williams prend progressivement le dessus. Les deux rivaux se partagent les 10 premiers GP : Prost vs Senna = 7-3. Après son 3e succès, à Monaco, Magic connait des ratés, et Prost fait le plein, s'installant confortablement en tête du championnat. Curieusement, dès la Hongrie, le Français est lui aussi rattrapé par la guigne : il ne marque que 4 points (3e à Francorchamps) en trois courses… mais Senna fait pire encore : 3 unités glanées en Belgique. C'est Damon Hill qui brille à Budapest, Francorchamps et Monza : un beau triplé pour l'équipier de Prost qui remporte ses premiers succès en F1.
En Italie, le Français a manqué l'occasion de devenir champion du monde. Avec 28 points d'avance sur Senna, il devait inscrire trois points de plus que le Brésilien pour être titré. À Monza, le Brésilien, trop impétueux, a terminé dans les graviers après deux accrochages : avec Hill au départ puis avec Brundle au 9e tour. Son rapide abandon aurait dû permettre à Prost d'ôter tout suspense au Mondial, mais le Français est trahi par son moteur, qui explose au 49e tour alors qu'il menait le GP depuis le départ.
C'est donc partie remise pour ce GP du Portugal, disputé le 26 septembre 1993 sur le circuit d'Estoril. Prost a désormais un nouveau dauphin : il compte 22 points d'avance sur Hill, son équipier, et doit en conserver au moins 20 après la course pour redevenir le roi du volant. Senna, lui, toujours à 28 unités, n'a plus le choix : il doit gagner les trois derniers Grands Prix et espérer une peu probable hécatombe chez Williams…
Prost sait que le titre ne peut plus lui échapper. Mais ses relations avec son écurie ne sont pas au beau fixe. Et il sait que son patron négocie avec… Senna en vue de la saison 1994. Alors, comme sur la piste, il prend les devants : le vendredi 24 septembre, Prost surprend tout le paddocks et annonce, malgré un contrat courant encore pendant une année, qu'il prend sa retraite à la fin de la saison. Quelques heures plus tard, Senna communique son départ de McLaren…
C'est Hill qui prend la pole-position de ce GP du Portugal, mais un souci électronique lors du tour de formation l'oblige à partir en fond de grille, et il laisse à Prost le soin de partir en tête. Le Français rate son départ, et se fait doubler par Häkkinen, puis Alesi et Senna ! Dès le 20e tour, le Brésilien, alors 2e derrière derrière Alesi, voit s'envoler ses dernières illusions : son moteur explose, il s'arrête dans l'herbe et perd ses derniers espoirs de titre mondial. Comme Alesi et Häkkinen rentrent au stand pour changer de pneus, Prost se retrouve en tête. Il sait qu'il doit gérer sa course, prier pour ne pas être victime d'ennuis mécaniques, et il sera couronné. Et quand le Français passe par les stands lui aussi, c'est Michaël Schumacher qui prend la tête. Le jeune Allemand résiste de manière acharnée à Alain Prost, dont la Williams est bien plus puissante que sa Benetton. Il ne sera plus rattrapé : Schumi remporte la deuxième victoire de sa carrière (après Spa 1992). Prost termine 2e et remporte à 38 ans son quatrième et dernier titre de champion du monde. Hill finit troisième. Le Français entame son tour d'honneur drapé d'un grand drapeau tricolore. Comme une tournée d'adieu.
Au Japon, ensuite, Senna gagne devant Prost. Sur le podium, les deux pilotes continuent de s'ignorer, stigmates de leurs duels fratricides de 1988 et 1989 chez McLaren. Même classement en Australie, en clôture de la saison, mais cette fois, la hâche de guerre est enterrée. Senna invite Prost à le rejoindre sur la plus haute marche du podium, sous les applaudissements de la foule. Ils se serrent la main. Prost peut partir en paix...
"Quand j'ai arrêté ma carrière, en 1993, Senna m'a dit, redit, expliqué que, d'une certaine manière, j'étais sa motivation première. Il voulait me battre. Quand il me l'a dit, j'ai pris ça comme un compliment. A partir du moment où j'ai arrêté de courir, on s'est beaucoup plus parlé que durant notre carrière. J'ai appris à l'apprécier humainement et à comprendre rétrospectivement son comportement face à moi", a confié Prost au Monde en 2014, lors de la célébration du 20e anniversaire de la mort du Brésilien...
Ils sont partis, champions
Quatre autres champions du monde de F1 ont, comme Alain Prost en 1993, pris leur retraite après avoir coiffer les lauriers.
- Mike Hawthorn en 1958. Débarrassé de Fangio, retraité, le Britannique livre à son compatriote Stirling Moss une lutte épique pour le titre, qu'il décroche grâce à sa meilleur régularité, et avec un petit point d'avance. Il se retire sur ce titre… mais décède quelques mois plus tard, victime d'un accident de la route !
- Jackie Stewart en 1973. Son 3e titre, acquis de haute lutte face à Fittipaldi, sera l dernier. L’Écossais a décidé depuis longtemps que cette saison 1973 serait sa dernière, mais il ne l'a termine même pas : il renonce à son 100e et dernier Grand Prix à Watkins-Glen, traumatisé par la la mort de son équipier et ami François Cevert aux essais.
- Nigel Mansell en 1992. Le Britannique avait déjà 39 ans, ne s’était pas mis d’accord financièrement avec son équipe qui venait d’engager... Prost et il avait reçu une belle proposition de poursuivre sa carrière aux États-Unis où il remporta le titre Cart en 1993. Le moustachu effectua par ailleurs un come-back chez Williams en 1994 à la place de Coulthard.
- Nico Rosberg en 2016. L'Allemand atteint son Graal (comme son père Keke Rosberg en 1982) après un duel acharné avec Lewis Hamilton, son équipier chez Mercedes. Il sait qu'il n'aura plus la motivation nécessaire pour se relancer dans un nouveau combat et décide de prendre sa retraite, à 31 ans.