Quand les Colombiens perdent la raison
Les menaces de mort proférées à l’encontre de Carlos Sanchez rappellent l’assassinat d’Andres Escobar en 1994.
- Publié le 24-06-2018 à 15h08
Les menaces de mort proférées à l’encontre de Carlos Sanchez rappellent l’assassinat d’Andres Escobar en 1994. En se faisant exclure au bout de trois minutes face au Japon, Carlos Sanchez a entraîné la défaite de son équipe. Réduite à dix et menée au score, la Colombie n’est jamais parvenue à rentrer dans son match pour renverser des Samouraïs bleus bien en place, empêchant les stars de la sélection colombienne de s’exprimer. "Il est difficile d’évoluer tout un match avec un homme en moins. Cela nous a coûté beaucoup d’énergie sur le plan physique, ce qui a permis au Japon de faire la différence", analysait José Pekerman après la rencontre.
Si le sélectionneur et les joueurs ont très certainement pardonné son geste fautif à Carlos Sanchez, cette exclusion a pris des proportions ahurissantes au pays puisque le joueur colombien a reçu de nombreuses menaces de mort sur les réseaux sociaux. Une affaire prise très au sérieux par les autorités colombiennes puisqu’une enquête policière a été ouverte suite à ces menaces de mort.
Il faut dire que ces menaces réveillent le terrible souvenir de l’assassinat d’Andres Escobar, abattu sur le parking d’une boîte de nuit de Medellín en 1994. La raison ? Dix jours plus tôt, lors du second match de groupe face aux États-Unis, le défenseur tente un tacle maladroit et dévie le ballon dans ses propres filets. Battue 1-2, alors qu’elle avait déjà été surprise par la Roumanie lors du premier match, la Colombie est éliminée de la Coupe du Monde alors que les espoirs d’aller loin étaient grands.
À leur retour au pays, les joueurs partis en héros reviennent comme des parias et les menaces de mort planent sur eux. Pourtant, ils sont loin de s’imaginer que le pire est à venir. "Dans le football, au contraire des combats de bêtes sauages, la mort n’existe pas. Personne ne meurt, personne ne se fait tuer. Il n’y a que du plaisir", avait même commenté Escobar suite aux menaces reçues.
Et pourtant, le 2 juillet 1994, alors qu’il était sorti dans une boîte de nuit avec ses amis et sa copine, il est apostrophé par plusieurs clients. C’est alors qu’une voiture déboule et qu’un certain Humberto Munoz Castro, garde du corps des frères Gallon, deux narcos notoires, sort et vide le chargeur de son pistolet sur le défenseur, criant Gol, à la manière d’un commentateur de football sud-américain, à chacune des balles tirées, ne laissant aucune chance à celui qui n’avait commis pour seule erreur que celle d’avoir inscrit un but contre son camp lors d’un match de Coupe du Monde.
24 ans plus tard, on ose espérer que les Colombiens ont tiré les leçons de cette tragique histoire et qu’ils n’oublieront pas qu’il ne s’agit que de football…