Pickford et Subasic, les deux héros que personne n'attendait
Jordan Pickford et Danijel Subasij sont des clés de leur équipe. Chose que personne n’attendait en début de Coupe du Monde.
- Publié le 11-07-2018 à 14h51
- Mis à jour le 11-07-2018 à 16h17
Jordan Pickford et Danijel Subasij sont des clés de leur équipe. Chose que personne n’attendait en début de Coupe du Monde.
L'Angleterre en pleine Pickford Mania
Le gardien a été décisif dans la phase à élimination directe
Et si, finalement, le héros anglais ne s’appelait pas Harry Kane mais Jordan Pickford ? Parce que la nature a horreur du vide, le gardien anglais s’est retrouvé projeté en pleine lumière contre la Suède quand l’attaquant a d’abord brillé par son travail de l’ombre.
Plus qu’un autre, Gareth Southgate, qui l’a rapidement installé dans les buts en raison de la qualité de son jeu au pied "qui permet de casser les lignes et d’alimenter nos attaquants", savoure la réussite de celui qu’il voit comme "le prototype du gardien moderne". Et l’exacte antithèse des portiers anglais.
Parce que Pickford n’est pas grand. Son mètre 85 tranche avec les standards habituels à son poste. Si la taille ne serait donc pas ce qu’il y a de plus important, le caractère du natif de Washington dans la grande banlieue de Sunderland a joué un rôle prépondérant dans son ascension.
Lui qui a intégré les Black Cats à 8 ans a d’abord joué dans le champ, jusqu’à être surnommé Speedy en raison de ses qualités de vitesse, avant de terminer dans les buts un jour où personne ne voulait y aller. Pour finir par ne plus en sortir.
International dans toutes les catégories d’âge, le gamin passe pro à 16 ans à son retour de la Coupe du Monde des U17 en 2011 où il avait éliminé l’Argentine en 8es en détournant déjà deux tirs au but. Avec une envie : celle de jouer. Tout de suite. Pickford le fera. En écumant ce que l’Angleterre peut offrir de plus british dans son football d’en bas.
Six prêts successifs, de la D5 au Championship, de Darling à Preston North End en passant par Alfreton Town, Burton Albion, Carlisle United et Bradford City. Avec à chaque fois la volonté pour les clubs qui l’ont accueilli de le conserver la saison suivante. En vain. De quoi se forger un caractère. Une carapace.
"Beaucoup pensent que je suis jeune, je n’ai fait que deux saisons en Premier League et je ne trouve pas que je suis si loin de cela de Courtois", disait Pickord après la qualification face à la Suède où il a été élu homme du match. "J’ai joué beaucoup de matches dans les divisions inférieures et je ne trouve pas que ce soit si différent de la Premier League ou des matches internationaux. Dans un sens, c’était même plus difficile. Quand vous allez jouer à Wrexham et Southport et que vous vous faites insulter, vous apprenez beaucoup et vous progressez. Quand il n’y a que 500 personnes autour du terrain, vous entendez tout et vous devenez vite un adulte."
Qui avait comme idole Joe Hart et qui s’est imposé à Sunderland en janvier 2016. Avant de devenir l’été dernier le troisième gardien le plus cher de l’histoire quand Everton a investi 34 millions d’euros pour lui.
Loin de se formaliser de ce statut, Pickford y a réussi une saison pleine. Est vite devenu aussi le chouchou des supporters qui l’ont élu joueur de l’année, tous tombant sous le charme de celui qui ressemble plus à un jeune qu’il pourrait croiser au pub du coin avec ses joues roses et sa silhouette pas forcément affûtée qu’à une star inaccessible et enfermée dans son monde. "C’est typiquement le gars du coin avec les pieds sur terre sans aucune arrogance mais avec la confiance en lui", a décrit dans le Daily Mail l’ancien coach des gardiens de Sunderland Adrian Tucker.
En couple avec Megan Davison qu’il a rencontrée quand il avait 16 ans et elle 14 ans et qui est devenue une petite célébrité grâce à ses photos de fêtes arrosées sur Instagram, Pickford reste un produit à finir, possède encore quelques carrences à la relance ou dans le jeu aérien. Mais il compense par la qualité de ses réflexes et sa vitesse de déplacement héritée de sa pratique de la boxe plus jeune. Et surtout, donc, par cette confiance en lui, débordante
"Les critiques ? Elles ne m’atteignent pas, avouait-il après la Suède. Le foot, c’est juste un jeu. Je suis quelqu’un de normal." Qui fait chavirer tout un pays de bonheur.
Subasic: boulette héros et larmes
Danijel Subasic, le portier croate, vit une Coupe du Monde complètement folle
Pas facile de marcher dans les pas de Drazen Dalic. Danijel Subasic y parvient pourtant bien avec une Coupe du Monde aussi chahutée que réussie.
S’il lui aura fallu près de 30 ans pour s’adjuger la place de numéro 1 incontestable des Damiers, il rentabilise bien le temps depuis qu’il en défend les cages. Une histoire rythmée par les penalties sauvés.
En 2016, à l’Euro, face à l’Espagne, il sauve un penalty de Sergio Ramos pour permettre à son équipe de gagner 2-1 et marcher sur sa poule. Jusqu’à une cuisante et imméritée défaite face au Portugal dans le match le plus ennuyant de l’histoire des Croates.
Ce contrecoup ne l’arrête certainement pas. Il aide Monaco à devenir champion de France au nez et à la barbe du PSG et son équipe nationale à décrocher son ticket pour la Coupe du Monde.
Un Mondial qu’il aborde, à l’image de ses équipiers, le couteau entre les dents. À 33 balais, il n’aura certainement plus la chance de jouer une demi-finale de Coupe du Monde.
La Croatie peut d’ailleurs le remercier pour avoir été aussi loin dans le tournoi. Le sélectionneur Zlatko Dalic n’a pas hésité à parler de Subasic comme d’un "héros qui a stoppé trois tirs au but" face au Danemark. Les médias lui ont octroyé la note de 10 sur 10 pour marquer le coup.
Un match pourtant entaché d’une grosse boulette du portier monégasque et conclu par un avertissement de la Fifa. Subasic avait montré un t-shirt à l’effigie d’Hvroje Custic, un ancien équipier décédé à 24 ans. Le gardien a fini en larmes en conférence de presse.
Pour rajouter encore un peu de drame à ce cocktail explosif, le gardien a réalisé un match fou face à la Russie en quart. Blessé à la cuisse à la dernière seconde du temps réglementaire ("J’ai senti une petite douleur mais j’ai demandé au coach de me laisser sur le terrain"), il a même dû demander à Dejan Lovren de donner son six mètres à sa place.
Une scène amusante mais rapidement balayée par un arrêt d’entrée de jeu lors de la séance de tirs au but. Dans son style particulier et avec un très large pas en avant avant de plonger, il a su faire la différence. La suite fait partie de l’histoire.
Son cas pose tout de même question en Croatie. Son absence à l’entraînement lundi a directement été contrebalancée par des nouvelles positives quant à l’état de sa cuisse. Il s’agit juste d’un œdème qui ne l’empêchera pas d’être aligné face à l’Angleterre.
Et la Croatie aura bien besoin de son solide gardien qui n’a encaissé que 0,8 but par match de moyenne, des chiffres équivalents à ceux de Jordan Pickford, son homologue du jour.