Les aventures d'un Belge expatrié en Finlande: filature, mise à l'écart et soupçons de corruption
- Publié le 13-10-2017 à 14h20
- Mis à jour le 13-10-2017 à 14h54
Ou la mauvaise histoire de Washilly Tshibasu, un Belge expatrié en Finlande. Le scénario est digne de ces polars nordiques qui font frissonner le lecteur puis le spectateur une fois adapté au cinéma. Sauf qu’il y a parfois un pas entre la fiction et la réalité que Washilly Tshibasu s’est retrouvé obligé de franchir.
Si le nom de ce Belgo-Congolais qui évolue en Finlande depuis 2013 après être passé par Mouscron et l’Antwerp ne vous parle pas, rien de plus normal. Son aventure ou plutôt ses mésaventures récentes éclairent d’un nouveau jour la réalité de ses nombreux joueurs expatriés dans des championnats plus ou moins lointains et obscures.
Tout commence comme dans un mauvais film dans la nuit du 14 juin dernier, à une période de l’année où le soleil ne se couche que quelques heures sur Kokkola, une ville du centre du pays sans véritable charme.
Washilly Tshibasu part chercher sa petite amie quand le couple se retrouve suivi par un véhicule qui tente de l’aveugler en utilisant ses phares. Le joueur baisse sa fenêtre et interpelle le conducteur et ses trois passagers qui lui répondent qu’il veulent en découdre. Interloqué, Tshibasu refuse de descendre. Lui ne connaît pas les occupants de la voiture. Au contraire de sa petite amie : son ex se tient derrière le volant.
Le petit manège se poursuit jusqu’à ce que l’Anversois contacte ses coéquipiers pour les avertir de la situation. Direction un parking où dès qu’il s’arrête, l’autre voiture en fait de même, surgissant sur lui avant de s’arrêter tout net en voyant les partenaires du joueur.
Le ton monte un peu, les portières claquent mais aucun coup n’est échangé et tout ce petit monde finit par rentrer chez lui. Fin de l’histoire ? Pas vraiment…
Dès le lendemain, Tshibasu dresse un récit précis des événements à son entraîneur et son président. "Pour eux, il n’y avait aucun souci, je ne devais pas m’inquiéter et je n’y pensais plus", témoigne-t-il.
Jusqu’à ce que l’histoire ne ressurgisse début septembre. Tshibasu vient de purger deux matches de suspension après une exclusion injustifiée contre Grankkullla.
En son absence, le KPV s’est fait accrocher par TPS (2-2) et Honka (1-3), voyant ses espoirs de montée dans l’élite finlandaise s’amenuiser.
Malade, le milieu offensif a manqué un troisième match, contre Jaro (0-0) alors qu’il avait demandé à jouer. "Et le lundi 11 septembre, au surlendemain de cette partie, le club me dit que je ne peux plus venir m’entraîner parce que la police avait rappelé et qu’elle voulait me parler ainsi qu’à l’ex de ma copine, pour tout mettre à plat. J’ai demandé au propriétaire si cela valait la peine de m’écarter : ‘Je ne sais pas ce qu’ils vous ont dit mais tant que rien n’est prouvé, je suis innocent’, lui ai-je clamé."
Le jour même, Tshibasu se rend au commissariat pour faire la lumière sur cette histoire. "J’ai demandé à la police s’il y avait une enquête ou une plainte contre moi, mais elle a vérifié. Rien. Et ma copine a alors porté plainte pour harcèlement car elle a trouvé injuste que je sois la victime de cela."
Les autorités lui donnent alors rendez-vous le 27 septembre. Avant d’annuler la confrontation la veille. Sans justification. "S’il y avait vraiment quelque chose, une enquête aurait déjà été ouverte", veut croire le milieu. "Hors ce n’est pas le cas. Je ne sais pas pourquoi je suis mis à l’écart. Le déroulement des choses prouve que ce n’est pas si grave. Ils utilisent cette histoire, mais il y a plus que cela, ce n’est pas possible."
Soit Thibasu en dit trop. Soit pas assez. Vient alors ce rapprochement fait après des heures à cogiter chez lui : il y a quelques jours, son équipe se voit impliquée dans des soupçons de matches truqués, l’un des fléaux du football finlandais. Les rencontres suspectées en question ?
Celles qui ont suivi la partie contre Jaro, la réception de Gnista (défaite 1-2) et le déplacement à Oulu (défaite 1-2). Deux matches que Tshibasu, accessoirement meilleur joueur de son équipe (8 buts et 3 passes décisives en 16 apparitions), totalement disponible aurait disputés sans cette drôle de mise à l’écart. "Quand j’ai vu cette histoire sortir, j’ai commencé à y penser."
Sans pour autant porter d’accusations. "Tout ce que je sais, c’est que je ne crois pas que je sois mis à l’écart à cause de cette poursuite et de cette supposée bagarre. Il n’a aucune preuve que je l’ai touché et je sais que si je l’avais vraiment touché, il aurait vu un docteur dès le lendemain. Ce qui n’a pas été le cas."
En attendant, le propriétaire du KPV, un riche homme d’affaires du coin qui emploie plus de 3.000 personnes, a indiqué dans la presse que la mise à l’écart de sa star était due "à des raisons personnelles".
"Mes coéquipiers ne savent pas vraiment ce qu’il s’est passé. J’ai essayé de leur expliquer, ils savent aussi comment notre propriétaire se comporte, il a mis à la porte trois joueurs de manière pas claire en juin et ils ont peur de lui dans un sens. Ils savent qu’il a fait une erreur mais préfère rester dans leur coin. C’est un peu la mentalité finnoise que de ne rien dire."
Les relations entre Tshibasu et son employeur (que nous avons contacté à plusieurs reprises, en vain) se résument à des messages échangés.
L’un des derniers en date avec le team manager était en fait une offre : "Il m’a proposé d’avoir mon salaire et ma lettre de sortie plus tôt, de vider et nettoyer l’appartement plus tôt".
Tshibasu entend, lui, rester en Finlande jusqu’au terme de la saison le 21 octobre prochain. Avant de revenir quelques semaines en Belgique, dans l’attente d’un nouveau contrat. Parce qu’il le clame : "Je veux jouer. Mais plus en Finlande."