Le match de légende: en 1987, Leo Van der Elst donna un récital face au Borussia
Battus trois à zéro à l’aller, les Brugeois se transcendèrent pour sortir le Borussia. Souvenirs.
- Publié le 08-01-2017 à 18h03
- Mis à jour le 08-01-2017 à 18h06
Battus trois à zéro à l’aller, les Brugeois se transcendèrent pour sortir le Borussia. Printemps 1987. Trente ans déjà ou presque. Cette saison-là, le Club Brugeois boucle la compétition sur la troisième marche du podium, à douze points du champion, le Sporting d’Anderlecht. Un accessit synonyme de ticket pour la Coupe de l’Uefa et que les Blauw en Zwart entendent composter le plus souvent possible.
Leur réputation d’équipe à l’appétit gargantuesque à domicile n’est plus à démontrer. Au cours de cet exercice 86-87, ils en ont zigouillé plus d’un devant des supporters hilares de bonheur : Waregem (8-0), le Beerschot (5-2), le RWDM (5-1), Berchem (5-0) et le Sporting de Charleroi (5-0) ont ainsi tous quitté la Venise du Nord en rasant les murs de l’Oympiapark.
La nouvelle campagne européenne des Flandriens démarre par un déplacement jamais évident, au Zenit Leningrad (appellation de l’époque). Le Petrovski Stadium n’inspire pas la bande à Henk Houwaart. Une défaite logique (2-0) annonce déjà la couleur du match-retour. Ce sera tout sauf évident, du moins sur papier. Mais en cette fin septembre, l’automne a encore un parfum d’été ensoleillé quand le Club accueille son hôte russe à qui il s’apprête à réserver un chien de sa chienne.
Un grand Danois d’1,83 m, ce soir-là, va déchiqueter à quatre reprises les filets russes aux 19e, 38e, 56e et 71e : Kenneth Brylle. Score final : 5-0 car Jan Ceulemans a également participé au festin (44e).
Pour le 70e match européen, le sort le convie à mettre à nouveau le cap à l’Est. L’expédition du FC à l’Étoile Rouge de Belgrade s’achève en eau-de-boudin (revers 3-1). Luc Beyens avait bien ouvert le score un peu avant la pause mais dans une enceinte en ébullition (80.000 spectateurs), la formation belge finit par plier à la 52e (1-1) avant de rompre dans les dix dernières minutes (2-1 à la 83e et 3-1 à la 90e sur penalty). Une fois encore, Bruges va devoir être au sommet de son art pour empêcher l’Étoile Rouge de filer en huitièmes.
Les retrouvailles avec Stojkovic et ses frères s’annoncent compliquées mais après treize minutes de jeu, Brylle exploite un ballon égaré par la défense adverse et ouvre une première brèche (1-0). La résistance serbe empêche toutefois le Club de doubler la mise avant le repos. Le doute va s’évaporer dès la reprise. D’une tête plongeante, le Caje fait 2-0 sur coup franc et dans la minute suivante, un centre de Leo Van der Elst se transforme en auto-goal signé Radovanovic (3-0).
Le train noir et bleu roule à toute vapeur vers la qualif et un ultime but de Beyens à la 88e parachève une excellente besogne collective (4-0). L’odyssée européenne peut continuer mais il a fallu deux miracles pour des Brugeois qui apprécient visiblement avoir le dos au mur…
Qu’en sera-t-il au tour suivant ? Quand bien même le Borussia Dortmund végète dans les bas-fonds de la Bundesliga (16e sur 18), le Westfalenstadion affiche sold out pour la venue du Club où la circonspection est de mise à la veille de ce match aller. Le samedi précédent, il s’est fait manger tout cru à la maison par le Beerschot (2-4) mais le Borussia n’a pas été plus à son affaire contre Hambourg (2-3). Maigre consolation pour la délégation brugeoise qui a choisi le car pour effectuer ce long déplacement. Pas au top de sa forme, Brylle est laissé sur le banc et van Wijk se blesse à l’échauffement d’avant-match.
Après cinq minutes de jeu, Leo Van der Elst manque une volée facile et c’est le départ des avatars pour son équipe. Le capitaine allemand, Mill, place les siens au commandement à la 12e. Un but aussitôt suivi de deux autres annulés par le ref. Si celui du local Mac Leod avait été entaché d’une faute de main, celui de Beyens paraissait parfaitement valable.
La seconde période voit les visiteurs perdre de leur répondant. Dickel tire sur le montant, prélude au deuxième goal rentré de la tête par Mill. Une bévue de Mamadou profite alors à Anderbrugge. Trois à zéro, l’addition est sévère et ne laisse guère de place à la rêverie. Le Borussia tient la corde et les jours des Brugeois en Coupe Uefa semblent désormais comptés. Mais à l’Olympiapark, on veut pourtant y croire, quitte à patienter et à recourir aux prolongations pour créer l’exploit.
Blessé en championnat le week-end précédant les retrouvailles, Jensen doit céder son poste à Vande Walle. Le challenge-dépannage a de quoi émoustiller Philippe qui, d’emblée, s’interpose brillamment devant Storck (5e).
Un avertissement sans frais qui donne du cœur à l’ouvrage à ses partenaires dont les assauts à répétition ne portent que chichement leurs fruits en première mi-temps. Juste un but de la tête de Ceulemans sur un centre de Rosenthal récompense les Brugeois dans le premier quart d’heure (1-0).
Ceux-ci remontent au jeu avec la même détermination. Un état d’esprit qui paie. Sur un corner de Degrijse repoussé du poing par de Beer, Leo Van der Elst, à travers une forêt de joueurs, ajuste une frappe au ras du piquet (2-0). Ceulemans marque à son tour mais l’arbitre invalide le but. Plus que sept minutes à jouer quand Bruges hérite d’un penalty que transforme L. Van der Elst (3-0). Sur un terrain durci par le gel, le Club aborde les extra-times crampons au plancher et de Beer retarde l’échéance devant Beyens mais doit aussitôt s’avouer vaincu sur une reprise de F. Van der Elst (4-0). C’est du délire amplifié à la suite d’un déboulé de Rosenthal que le gardien allemand stoppe fautivement. Sur son nuage, le brave Leo remet le couvert avec le même flegme qu’à Puebla deux ans plus tôt (5-0).
Auf wiedersehen, Borussia !
Les causes désespérées : le FC Bruges raffole de ça
En 1975, les Blauw en Zwart avaient renversé la vapeur après une lourde défaite à Ipswich.
La glorieuse épopée européenne du Club Brugeois en C3 évoquée ci-contre s’achèvera en demi-finale, face à l’Espanyol de Barcelone, le finaliste de l’épreuve remportée aux tirs au but par le Bayer Leverkusen.
Après avoir magistralement défenestré le Borussia, le team de Henk Houwaart fit la passe de quatre en éliminant le Pana en quarts. Une fois de plus, les Flandriens avaient disputé la manche aller au pied du Pirée (2-2, buts de Ceulemans et de Degrijse) avant de mater les Grecs au retour (1-0, but de Brylle).
La donne changea en demi-finale puisque Bruges hébergea d’abord l’Espanyol (victoire 2-0 grâce à un but de Ceulemans et un auto-goal de Gallart) mais ne put tenir la distance en Catalogne, s’inclinant 3-0 durant les prolongations.
L’Histoire européenne du Club regorge d’ailleurs de retournements de situation, comme en 1975. Lors de seizièmes de finale de la Coupe Uefa, Bruges s’était incliné 3-0 à Ipswich Town le 22 octobre (buts de Gates à la 21e, de Peddelty à a 55e et de Austin à la 66e) mais sut trouver les ressources mentales nécessaires pour enterrer les espérances anglaises le 5 novembre. Score final, quatre à zéro à la faveur de buts inscrits par Lambert sur penalty (10e), De Cubber (26e), Le Fèvre (40e) et Vandereycken (88e).
Un exploit qui permit aussi à Bruges de faire un très long chemin dans cette C3, ne baissant pavillon qu’en finale (aller-retour) face à Liverpool. Ces deux clubs se retrouveront d’ailleurs trois ans plus tard, en finale de la C1 cette fois et toujours avec un verdict favorable aux Reds. Le gardien danois Birger Jensen fut en fait le seul Brugeois à avoir connu toutes ces folles randonnées européennes. Arrivé en Belgique en 1974, il fit encore une courte pige au Lierse avant de quitter la Belgique en 1988. Un petit détour par les Pays-Bas (Walwijk) et puis Birger rentra au pays natal. Il a aujourd’hui 65 ans.