L’envol du pélican Louis van Gaal
À 65 ans, Louis van Gaal a décidé de mettre fin à sa carrière d’entraîneur. Retour sur un drôle de parcours...
- Publié le 18-01-2017 à 11h40
- Mis à jour le 18-01-2017 à 11h41
À 65 ans, Louis van Gaal a décidé de mettre fin à sa carrière d’entraîneur. Retour sur un drôle de parcours... "J'ai pris une année sabbatique et ensuite, je vais peut-être décider si c'est oui ou si c'est non. Et il y a de fortes possibilités que je me retire. Mais ce n'est pas définitif."
Alors qu’il venait d’être honoré par le gouvernement néerlandais pour sa contribution au football ce lundi, Louis van Gaal a décidé de dire stop.
Libre depuis son départ de Manchester United, le Batave n’a pas emprunté le pont d’or offert par un club chinois qui lui proposait 50 millions d’euros. Lui a préféré quitter la scène. Une décision motivée, selon De Telegraaf, par la disparition d’un de ses gendres le mois dernier. Le rideau tombe sur une carrière à l’image du personnage : hors-norme. Doué. Et grande gueule.
Petit dernier d’une fratrie de 9, de son nom complet Aloysius Paulus Maria van Gaal, il se rêvait grand joueur. Mais a vite touché du doigt ses limites que Jean Trappeniers, qui l’a côtoyé durant ses années anversoises, dépeignait ainsi dans nos colonnes en 2012 : "C’était un très bon joueur, excellent technicien mais aussi très lent. En plus, il voulait souvent faire tout, tout seul. Guy Thys disait : ‘quand on joue avec Louis, il faut deux ballons, un pour l’équipe et l’autre pour Louis’ ", s’amusait l’ancien gardien qui se souvenait aussi "d’un vrai Néerlandais qui savait tout mieux que tout le monde. Mais il faut croire qu’il avait souvent raison car il est devenu un formidable coach".
Qui a gagné partout où il est passé. À l’Ajax d’abord où, l’espace de 6 ans, il a démontré un concentré de son savoir-faire basé sur les jeunes et un vrai style. Van Gaal y a fait émerger une génération qui allait porter son nom : celle des Kluivert, Davids, van der Sar, Seedorf, de Boer ou Reiziger, les premiers nés de ce formateur hors pair qui a fait éclore ensuite Alaba, Xavi, Iniesta, Müller, Badstuber ou encore Rashford…
Il a aussi conduit son club formateur au sommet avec ce succès en Ligue des Champions remportée avec flamboyance.
"Peu d’équipes, parmi toutes celles que j’ai pu voir jouer, m’ont autant séduit que l’Ajax de van Gaal", a un jour reconnu Pep Guardiola. "Il donnait des leçons de football à ceux qui connaissaient parfaitement le jeu."
Son savoir-faire s’est ensuite exporté à Barcelone avec deux doublés Coupe-championnat. Et des premiers grincements de dents. Notamment avec la colonie brésilienne. Giovanni, par exemple, dans une analogie très douteuse, l’a comparé à "Hitler".
L’étoile du Néerlandais a commencé à pâlir au moment de sa nomination sur le banc de la sélection oranje en 2000. Ce qui devait être une consécration s’est transformé en coup d’arrêt avec le retentissant échec sur la route du Mondial 2002. Ses retours à Barcelone (8 mois et puis s’en va) puis à l’Ajax ont marqué le début de sa traversée du désert qui a pris fin en 2009 avec cette improbable conquête du titre avec l’AZ.
"Le groupe était très jeune et acceptait la remise en question et la critique. Quand tu as 18 ou 20 ans et qu’un coach comme lui te fait des remarques, tu écoutes différement. Il était très dur avec les joueurs mais juste", précise Sébastien Pocognoli, qui garde le souvenir d’un "entraîneur très méticuleux qui lui a donné goût au football". "Il a réussi à rendre les joueurs meilleurs", poursuit le Liégeois.
Cette réussite a permis à van Gaal de réaliser son rêve : rejoindre le Bayern. Qu’un Néerlandais de sa génération voue un culte au football allemand symbolise la complexité du personnage. Son passage a marqué l’institution bavaroise. Tout en forgeant sa légende avec notamment le fameux épisode où il n’a pas hésité à baisser son pantalon dans le vestiaire pour prouver qu’il en avait des assez grosses pour mettre n’importe qui sur le banc lors de la saison 2009-10. Effet garanti.
"Disons que, parfois, une image parle plus que des mots", (sourire) s’amuse Daniel Van Buyten. Le Diable n’a pas oublié la scène. "Ce jour-là, il a peut-être été emporté par l’émotion. C’est quelqu’un qui vit son boulot à 100 %. Ce qu’il faisait aussi souvent, quand les joueurs ne voulaient pas aller au duel, c’est qu’il appuyait sur son nez qu’il s’était cassé à de nombreuses reprises pour montrer qu’il fallait donner de sa personne", reprend Big Dan, qui évoque "une personne au premier abord très discipliné, tourné sur ses objectifs avec une grande force de caractère. Mais quand on creuse un petit peu, on s’aperçoit que c’est quelqu’un de grande qualité, avec beaucoup d’humour", dont il assure ne garder "que des bons souvenirs".
Ce qui, à Munich et partout où il est passé, n’a pas été le cas de tout le monde. À commencer par Uli Hoeness pour qui "le problème de van Gaal est qu’il se prend non pas pour Dieu mais pour le père de Dieu". "Avant même que le monde n’existe, Louis van Gaal était déjà là", a clamé le président du Bayern.
Cette exigence parfois extrême a servi de trame à sa carrière poursuivie ensuite à la tête de la sélection où il a accompli des miracles au Mondial brésilien en 2014 vu les ressources à disposition avant ses deux dernières saisons à Manchester United qu’il a bouclées en remportant son 17e trophée. Le dernier d’une drôle d’œuvre.
Trois flirts avortés avec les Diables
Louis van Gaal sélectionneur des Diables ? À trois reprises, le Néerlandais s’était positionné. En vain. En mai 2009, son compatriote Dick Advocaat lui a finalement été préféré alors que, financièrement, un accord avec la fédération était proche et van Gaal s’en est allé au Bayern où il confie à Daniel Van Buyten qu’il aurait voulu entraîner les Diables. Le Néerlandais retente sa chance en mai 2012 après le départ de Georges Leekens. Sa candidature est repoussée. Comme elle le sera l’été dernier, jugée trop monotone par l’état-major fédéral qui ne l’a pas short listé au contraire des Roberto Martinez, Ralf Rangnick et Rudi Garcia.