Dudelange va vivre le plus grand match de son histoire: "Les Milanais seraient fous de nous snober"
Le foot luxembourgeois va vivre le plus grand match de son histoire ce jeudi entre Dudelange et l’AC Milan. Un exploit forgé, en partie, grâce au directeur sportif bruxellois Yassine Benajiba. Il donne les recettes locales
- Publié le 20-09-2018 à 11h24
- Mis à jour le 20-09-2018 à 12h28
Le foot luxembourgeois va vivre le plus grand match de son histoire ce jeudi entre Dudelange et l’AC Milan. Un exploit forgé, en partie, grâce au directeur sportif bruxellois Yassine Benajiba (au centre de l'image). Il donne les recettes locales.
Imaginez l’AFC Tubize en poules de la Ligue Europa. Impossible ? Ça se passe pourtant près de chez vous. Ce jeudi soir, les Luxembourgeois du F91 Dudelange et leurs 3 millions de budget (un peu moins que les Brabançons en D1B) vont défier l’AC Milan où le seul Gonzalo Higuain touche deux fois toute la trésorerie annuelle du champion en titre de la BGL Ligue. Un exploit rafraîchissant que l’on doit, en partie, à un Bruxellois : Yassine Benajiba, 33 ans et ancien espoir du foot belge quand il évoluait à Mouscron au début des années 2000. Manager sportif de Dudelange ces deux dernières années après y avoir terminé sa carrière de joueur, il a permis au club de franchir un cap via 19 transferts, dont quelques grands noms comme le défenseur Milan Bisevac (ex-PSG et Lazio) et le médian Marc-André Kruska (ex-Dortmund et Bruges).
Juste avant le plus grand match officiel de l’histoire du foot luxembourgeois, Benajiba a pourtant annoncé sa démission.
Yassine, pourquoi quittez-vous Dudelange pile au moment où le club va vivre le plus beau moment de son histoire ?
"L’objectif était d’aller dans ces poules de la Ligue Europa avec le F91. Il est atteint et je peux maintenant me tourner vers d’autres choses. Le terrain me manque et j’ai entamé les cours d’entraîneurs à l’Union belge avec la session des ex-pros. Je suis en classe avec mon grand pote Emile Mpenza. Mais tout cela ne m’empêchera pas de vivre l’aventure européenne de Dudelange à fond."
Quelle est la recette de Dudelange pour arriver à pareil exploit ?
"Même avec un budget inférieur à d’autres équipes en Europe, comme le Legia Varsovie et Cluj que nous avons sortis en tours préliminaires, il y a moyen de faire du bon travail. En faisant les bons transferts et en ayant un bon entraîneur, on peut déjà aller loin. C’est le cas à Dudelange avec Dino Toppmöller, le fils de Klaus qui a été coach à succès à Leverkusen. Il a en plus un très bon staff. Pour financer ça, on peut compter sur le grand patron, Flavio Becca. C’est un milliardaire qui adore son club mais qui aime investir dans le sport. C’est moi qui l’ai poussé à racheter Virton cet été."
Comment se passe le recrutement dans un club trop riche pour le championnat luxembourgeois mais très pauvre au niveau européen ?
"Sur deux grands axes. Premièrement, on essaie d’avoir les meilleurs joueurs luxembourgeois avec nous. Je suis par exemple allé chercher l’attaquant Sinani, 21 ans, au Racing Luxembourg. Aujour- d’hui, c’est le joueur le plus en vue du pays. Beaucoup de clubs sont sur lui. C’est un super talent qui ferait le bonheur des clubs de Pro League. Et deuxièmement, on tente d’amener des bons joueurs de l’étranger. Des anciens pros qui viennent amener leur expérience. On regarde les marchés belge, allemand et français."
Des anciens pros qui restent pros chez vous quand même.
"Oui, les salaires sont confortables. On est mieux payé ici qu’en D1 amateur en Belgique. Certains gagnent même des sommes proches de ce qu’on peut trouver en D1B."
Malgré la proximité de la Belgique (Dudelange est à 50 km d’Arlon), vous vous tournez assez peu vers notre football quand on regarde votre effectif.
"On avait Soumaré (ex-Anderlecht) sous contrat mais on l’a prêté à Virton. J’ai aussi eu un contact avec Jordan Remacle en début de mercato mais ça ne s’est pas fait. Je suis Belge mais je regarde avant tout les qualités d’un joueur, pas sa nationalité."
C’est facile de convaincre des joueurs de venir au Luxembourg ?
"Ça a changé ces dernières années. Les gens voient que c’est terminé l’époque où le Luxembourg prenait systématiquement un 6 ou 7-0. Le football ici a progressé et ça intrigue pas mal de monde. Et comme Dudelange est un peu le PSG du Luxembourg, on parvient à les convaincre définitivement."
L’image de l’amateurisme qui colle à la peau du foot luxembourgeois doit être oubliée quand on évoque le F91 ?
"Clairement. Il reste 3 joueurs qui ont un job dans notre noyau A. Ils ont d’ailleurs déjà épuisé tous leurs jours de congé pour jouer les préliminaires. Mais à part ça, l’environnement est professionnel. Il y a entraînement tous les jours et même une double séance deux fois par séance. Il ne faut vraiment pas croire que les joueurs doivent reprendre leur maillot pour nettoyer chez eux (sourire)."
Comment le F91 s’est-il organisé pour recevoir l’AC Milan puis l’Olympiacos et le Betis Séville ?
"Cela a demandé beaucoup d’heures de boulot. Dans le comité, tout le monde n’est pas professionnel. On ne pouvait pas accueillir de telles rencontres dans notre stade et on va jouer au Josy-Barthel, l’enceinte de l’équipe nationale à Luxembourg. On a eu quelques soucis pour la billetterie mais ça s’est finalement réglé. En 24 heures, les 8.000 places étaient vendues. Les gens sont curieux ici. C’est le plus grand exploit du football luxembourgeois."
Quel est l’objectif contre Milan ?
"Même si Milan n’est plus la grande équipe d’avant, ça reste un autre monde. Les Italiens seraient quand même fous de nous snober. Je pense que le match nul n’est pas impossible ce jeudi."
En jouant à onze derrière ?
"Même pas. Notre coach partage la philosophie du Barça. Moi aussi d’ailleurs. On veut toujours jouer. Contre Cluj, on n’a jamais balancé de longs ballons. On cherchait la solution au sol. Même si on sera évidemment prudent face à Milan, on ne reniera pas nos valeurs."