Retrouvailles avec Imoh Ezekiel: "Après le Standard, je devais signer à Tottenham"
Imoh Ezekiel était promis à un très bel avenir mais à 25 ans, il est rentré à Courtrai.
- Publié le 10-11-2018 à 07h21
- Mis à jour le 10-11-2018 à 09h35
Imoh Ezekiel était promis à un très bel avenir mais à 25 ans, il est rentré à Courtrai. "Tu viens de Liège ? Tu as eu deux heures de route pour venir jusqu’ici alors." Imoh Ezekiel est rentré en Belgique cet été après avoir pas mal bourlingué, mais il n’a pas perdu ses repères. La Cité ardente a marqué le début de son parcours footballistique, lui qui a réellement lancé sa carrière professionnelle au Standard. À cette époque, tout le monde imaginait qu’il allait suivre la même trajectoire que Michy Batshuayi, avec qui il partageait la pointe de l’attaque liégeoise, mais d’étranges choix sportifs et des transferts ratés l’ont empêché de réaliser le parcours que ses qualités méritaient.
Aujourd’hui, le format de poche tente de se relancer à Courtrai, où il a paraphé un contrat de trois ans lors du dernier mercato estival. "Je voulais revenir en Belgique car je connais bien le championnat et je considère ce pays comme ma deuxième maison. J’y ai toujours été très bien accueilli et les gens, que ce soit à Liège, Bruxelles ou Courtrai, sont très gentils avec moi", concède celui qui a également été courtisé par l’Antwerp. "Lorsque mon agent m’a fait part de l’intérêt courtraisien, je me suis souvenu que j’y avais souvent connu des matches difficiles et que l’ambiance était très chaude. C’était donc la bonne équipe pour me relancer et écrire un nouveau chapitre de ma carrière."
C’est exactement là où se situe le sympathique attaquant. À vingt-cinq ans, il a besoin de retrouver un temps de jeu qui lui a souvent fait défaut dans ses précédents clubs. Que ce soit à Anderlecht ou à Konyaspor. "Sincèrement, mon passage en Turquie est le plus grand regret de ma carrière. Au début, j’étais intéressé à l’idée de découvrir cette compétition mais rapidement, je n’ai plus reçu mon salaire et j’ai eu des problèmes avec mon visa. Cela m’a empêché de jouer l’Europa League et je ne pouvais même pas accompagner mes équipiers en stage de présaison car mes papiers n’étaient pas en ordre. Je devais rester en Turquie et jouer avec la réserve. J’avais l’impression d’être comme un touriste en vacances. J’ai dû me battre pour avoir mon argent et des papiers en ordre. Quel manque de professionnalisme !"
Heureusement pour lui, cet enfer n’a duré que six mois, le temps de partir à Las Palmas durant le mercato estival. "Tout est allé mieux là-bas et j’y ai retrouvé le plaisir de jouer au foot", dit celui qui a notamment joué contre le Real Madrid et le FC Séville. "Je jouais avec de bons équipiers et le football local correspondait davantage à mes qualités. Malheureusement, l’équipe a chuté en D2 et, comme le stipulait une clause, cela a cassé avec effet immédiat mon contrat. Personnellement, je serais bien resté mais visiblement, le club a connu quelques problèmes financiers."
Voilà comment celui qui cassait les défenses belges avec sa pointe de vitesse et sa technique s’est retrouvé, l’été dernier, libre de tout engagement. Bien loin de ce que tout le monde imaginait il y a seulement quatre ans. À cette époque, de nombreux clubs s’intéressaient à ses services et étaient disposés à délier les cordons de leur bourse pour arracher sa signature. "Je devais aller à Tottenham mais vu que je n’avais pas assez de temps de jeu avec mon équipe nationale, je n’ai pas reçu mon permis de travail. C’est la règle là-bas, il n’y avait pas le choix", raconte-t-il. "Je ne pense pas à ce qui aurait pu m’arriver si j’avais rejoint les Spurs car c’est tout bonnement impossible. Aujourd’hui, je suis à Courtrai et c’est que je devais y être, tout simplement."
Il n’y a aucune amertume dans son discours. Beaucoup de joueurs auraient certainement baissé les bras mais Imoh Ezekiel préfère voir le verre à moitié plein. Il n’est pas encore à la moitié de sa carrière active et l’avenir peut lui réserver de belles surprises. "Quand je jette un regard en arrière et que je vois où j’ai commencé et où j’en suis aujourd’hui, je me dis que je ne dois pas avoir de regret. Ce n’est pas mauvais mais je continue à en vouloir davantage. Certains empruntent d’autres chemins, sont plus rapides mais chacun doit tracer sa propre route. Je suis encore jeune et si je retrouve mon meilleur niveau, signe une très belle saison, on ne sait pas ce qu’il peut m’arriver. Jouer dans une grande compétition est toujours possible."
"It’s part of the game", comme il aime le répéter. Il avait peut-être le même niveau qu’un Michy Batshuayi mais "ça fait partie du jeu". Pour le moment, son retour en Belgique est assez discret, avec seulement six apparitions en championnat (une titularisation) et une seule passe décisive à son compteur personnel. "Je ne suis pas encore à cent pour cent. J’ai été ralenti par une petite blessure mais maintenant, j’ai besoin d’enchaîner les rencontres pour retrouver mon meilleur niveau et aider l’équipe. Nous n’en sommes qu’à la moitié de la phase classique, il reste donc beaucoup de matchs à jouer et se rapprocher du top 6 est encore dans nos cordes."
"Edmilson n'a pas marqué 20 buts au Qatar"
Ezekiel dit y avoir son meilleur football dans un championnat pas si facile que cela.
Depuis son premier départ du Standard, Imoh Ezekiel a rarement retrouvé son meilleur football à cause d’un temps de jeu insuffisant ou de choix peu opportuns. "C’est quand même au Qatar où j’ai été le plus performant", dit-il. "Les gens pensent que tout est facile là-bas mais si c’était le cas, Edmilson Junior y aurait déjà planté au moins vingt buts. Mais ce n’est pas le cas. Comme moi, il est arrivé avec un statut d’étranger qui l’oblige à ne pas pouvoir se relâcher car le club ne peut en mettre que quatre sur la feuille de match."
Onze buts en trente-trois apparitions : ses statistiques avec Al Arabi sont intéressantes mais ce transfert lui a surtout permis de se mettre financièrement à l’abri. "Mais cela rajoute de la pression car le joueur doit montrer qu’il mérite bien son contrat" , rigole-t-il lorsque nous lui faisons remarquer qu’il est maintenant tranquille, sur ce plan, jusqu’à la fin de sa vie. "Vous pouvez penser ce que vous voulez, mais je continue à travailler. Et puis, il faut penser au football et à sa famille. Edmilson, comme moi, doit certainement avoir une grande famille et c’est important de pouvoir l’aider."
Son séjour à Doha lui a aussi permis de découvrir une nouvelle culture et un rythme bien plus calme qu’en Europe. "Il y a beaucoup de soleil. Il y en a même trop et tu ne peux parfois pas mettre un pied dehors. Mais c’est vrai que la vie est belle là-bas. On peut y passer tranquillement du temps en famille, on ne croise pas des fous et on ressent beaucoup moins le stress au quotidien."
"Mpoku est comme un frère"
Il se réjouit de retrouver son ancien club, même s’il ne sera certainement pas titulaire.
L’interview se déroule dans les loges du stade des Éperons d’Or, à l’exact opposé d’où se situeront les supporters du Standard ce dimanche. L’attaquant nigérian s’attend à un accueil particulièrement chaud à cause de son passage à Anderlecht. "J’ai reçu beaucoup d’insultes lorsque j’ai signé chez les Mauves. Quand je suis revenu à Sclessin avec le maillot d’Anderlecht, je pense que certains fans avaient envie de me tuer", sourit-il. "J’ai joué longtemps au Standard et seulement une saison à Bruxelles, donc je dirais que je suis un homme du Standard quand même, mais je ne pense pas que ça va empêcher les supporters liégeois de me siffler dimanche (rire)."
Il n’oublie pas que c’est au Standard qu’il a réellement pu lancer sa carrière au plus haut niveau. "D’ailleurs, je pense que je ne célébrerai pas mon but si je marque."
Ce match lui permettra également de retrouver des amis. Notamment Paul-José Mpoku avec qui il entretient encore d’excellents contacts. "Polo a été quelqu’un de très important dans ma vie. Il jouait aussi avec la réserve lorsque j’ai débarqué à Liège et il m’a donné énormément de conseils. Il est comme un frère pour moi et on s’enverra quelques messages ce week-end, c’est certain."
Depuis son départ, la direction n’a plus cherché à le récupérer. Pourtant, les supporters sont convaincus qu’il manque un joueur de son profil dans le noyau. C’est-à-dire quelqu’un capable de casser les lignes grâce à sa vitesse. "Je ne peux pas dire que le Standard n’a pas de joueur comme moi. Et puis, ça dépend aussi de la tactique. À mon époque, on jouait avec deux attaquants mais pour le moment, j’ai l’impression qu’il n’y a plus qu’une seule pointe" , dit-il. "J’ai regardé le match à Krasnodar jeudi. Le Standard a vraiment fait un bon match mais ces deux bêtes buts encaissés à la fin, c’est dommage. Ce dimanche, je pense que ce sera du 50-50 car tout le monde sait qu’il n’est pas facile de battre Courtrai à domicile. Mais bon, le plus important est de ne pas perdre contre Polo Mpoku", termine-t-il en rigolant.