Jos Daerden: "On sortait jusqu’à 4h mais, à 10h, on était sur le terrain"
Jos Daerden, T2 du futur adversaire des Rouches, a connu la période dorée des Limbourgeois au Standard.
- Publié le 24-11-2017 à 11h02
- Mis à jour le 24-11-2017 à 11h05
Jos Daerden, T2 du futur adversaire des Rouches, a connu la période dorée des Limbourgeois au Standard. Au fil de ses pérégrinations, Jos Daerden n’a pas changé. Le sexagénaire garde cette bonne humeur qui ne trahit pas le plaisir d’avoir retrouvé, en janvier dernier, Genk, l’un de ses deux clubs favoris "avec le Standard, bien entendu", juge-t-il utile de préciser. Installé au premier étage de la Cristal Arena, le Limbourgeois aime toujours autant discuter et prolonge l’entretien, alors que l’attaché de presse nous avait accordé une demi-heure. "Je vais encore de temps en temps à Sclessin. J’y retrouve mes amis : Léon Semmeling, Christian Piot, Eric Gerets ou encore Wilfried Van Moer. Nous sommes bien accueillis et l’accueil des supporters est très chaleureux. Les plus jeunes ne savent pas qui je suis mais leurs parents… ou leurs grands-parents font les présentations."
Jos Daerden a tout connu en bord de Meuse : ses plus belles années footballistiques avec deux titres nationaux et une finale européenne mais aussi un cadre de vie idéal. Au début des années 80, il formait l’épine dorsale du club en compagnie de nombreux Limbourgeois. Les Eric Gerets, Willy Geurts, Patrick Aussems, Théo Poel et Guy Vandersmissen sont devenus des légendes de Sclessin. "Roger Petit, notre secrétaire général, nous aimait bien parce qu’avec nous, les discussions étaient rapidement bouclées au moment de la négociation d’un contrat. Il n’y avait pas de pièges, on allait droit au but. Et les supporters appréciaient notre mentalité qui correspondait à leurs valeurs. Nous ne formions pas un clan dans le vestiaire, bien au contraire. J’ai encore des contacts avec Christian (Labarbe), Michel (Renquin), Helmut (Graf) ou Asgeir (Sigurvinsson)."
Cette cohésion se retrouve sur le terrain, où le bloc liégeois règne en maître dans le pays, mais aussi en dehors. Le lundi soir était souvent réservé aux sorties. Ou à la décompression, selon l’angle de vue. "C’était plutôt un lundi par mois", tempère l’ancien milieu de terrain. "Pratiquement tout le vestiaire y allait. On filait à Maastricht où on passait incognito pour manger un petit quelque chose. On y allait même pendant la période de carnaval. Aujourd’hui, ce serait impossible car on retrouverait des photos sur les réseaux sociaux. Franchement, je préférais être un joueur il y a quarante ans qu’aujourd’hui. Sauf pour les sous !"
Dans ces rendez-vous nocturnes, l’ambiance était souvent au rendez-vous. "Sur le terrain, on pouvait s’engueuler mais deux heures après, tout le monde rigolait autour d’un verre. Je me souviens d’une explication très musclée entre Eric Gerets et Gerard Plessers lors d’un match au Cercle. Les deux étaient des dominateurs mais quelques minutes plus tard, Eric marquait sur une passe de Gerard. Il ne fallait pas être un fainéant avec Gerets. Il voulait tout gagner, même les petits matchs à l’entraînement", se souvient-il. "Nos sorties, c’était du team building. Une fois, j’avais dû aller rendre visite à un club de supporters à Bruxelles avec Asgeir mais, sur le chemin du retour, on était passé par Liège pour boire un dernier verre avec quelques équipiers. On se retrouvait aussi dans un karaoké et on s’amusait toute la soirée. Moi, je chantais souvent du André Hazes avec Tahamata mais, parfois, Simon sortait sa guitare et là, c’était parti pour des heures. Les soirées du lundi étaient réservées aux hommes mais on organisait aussi des fêtes avec nos épouses et là, on cherchait souvent des thèmes. Une fois, nous avions dû tous venir habillés en blanc. C’était très sympa !"
À l’époque, pourtant, le Standard devait composer avec un programme particulièrement lourd à cause de la Coupe d’Europe. Mais Raymond Goethals ne tenait pas à brider la bonne humeur de son groupe. "Bien sûr qu’il était au courant ! Il ne disait rien car lui était seulement obnubilé par le match. Parfois, on rentrait à quatre heures du matin mais le lendemain, on courait à dix heures au golf du Sart-Tilman. C’était huit ou dix kilomètres. Cela faisait mal, très mal mais on le faisait…"
Aujourd’hui, les Limbourgeois ont complètement disparu du noyau liégeois. Sinan Bolat, Koen Daerden et Kristof Van Hout ont été les derniers représentants de cette province tellement proche de Liège. Il y a quelques mois, Bruno Venanzi ne cachait d’ailleurs pas son souhait de renouer avec cette tradition. "Mais c’est difficile de recruter des joueurs belges car ils coûtent très cher. Nous avons le même problème à Genk."
"Au début, ce n’était que des longs ballons"
Genk a retrouvé la bonne carburation avec une série de neuf matchs consécutifs sans défaite. Un bilan qui a permis à Albert Stuivenberg de retrouver un peu de sérénité. "Je ne vais pas vous mentir, j’avais un petit peu peur avant notre déplacement à Anderlecht", dit Jos Daerden, son adjoint. "La direction était également sous pression car, aujourd’hui, tout le monde peut donner son avis, que ce soit la presse ou les supporters, qui ont de multiples canaux pour s’exprimer. Tout cela n’existait pas il y a dix ans et le métier était un peu moins compliqué. Personnellement, j’ai toujours dit qu’il n’y avait rien de cassé entre le staff et les joueurs. Au final, je suis content qu’aucune décision n’ait été prise."
Genk a retrouvé la sixième place du classement général et peut créer un petit trou s’il bat l’un de ses concurrents directs, ce dimanche. "Mais il est trop tôt pour parler de match décisif. Aujourd’hui, trois équipes semblent assurées de participer aux playoffs 1 : Bruges, Charleroi et Anderlecht. Pour le reste, je pense que cela se décidera au tout dernier moment, même si j’espère que cela ira plus vite pour nous", sourit-il. "Le problème, c’est qu’on ne laisse plus à un entraîneur le temps de construire une équipe. C’est essentiellement à cause de notre système de compétition. Avec deux défaites consécutives, on peut se retrouver à la dixième place… alors qu’on n’est qu’à deux points du Top 6. Regarde, nous n’avons pas bien joué à Zulte Waregem mais nous avons gagné (0-1) et hop, nous voilà sixièmes !"
Jos Daerden se méfie quand même du Standard. "J’ai vu la meilleure mi-temps des Liégeois cette saison : la seconde à Mouscron. J’étais aussi à Gand et là, le Standard ne méritait pas de perdre car il était plus fort dans le jeu et le pressing", analyse-t-il. "L’équipe joue plus au football qu’en début de saison, où elle se contentait de taper des longs ballons devant. Cette équipe progresse avec une belle association entre Mpoku, Carlinhos et Sa. C’est d’ailleurs bizarre qu’avec autant de talent, le club marque aussi peu de buts. J’espère que cela durera une semaine de plus…"
"Un basketteur comme n°10…"
Jos Daerden a entraîné le Standard durant une saison. En 1996-1997, le club a terminé à la septième place. "Nous avions occupé la première place onze fois lors des 17 premières journées."
À cette époque, le Limbourgeois n’avait pas été aidé par les circonstances. "Je suis arrivé juste après la fusion avec Seraing et de nombreux joueurs sont partis : Marc Wilmots, Gilbert Bodart, Régis Genaux après deux ou trois journées et Alain Bettagno. Puis le 31 août, en pleine trêve internationale, on m’annonce que Michaël Goossens vient de signer au Genoa", dit-il. "Au deuxième tour, j’ai perdu trois joueurs sur blessure : Guy Hellers, Dinga et Benny Debusschere. J’ai dû aligner Axel Lawarée comme attaquant et Bernd Thys au back droit."
Malgré tous ces départs, la direction n’avait pas mis la main au portefeuille. "Heureusement, j’ai récupéré quelques bons joueurs de Seraing, comme Edmilson, Wamberto, Lawarée. On avait des jeunes joueurs comme Roberto Bisconti, qui était un peu fou dans sa tête", sourit-il. "J’avais aussi le Polonais Waldemar Jaskulski. Il lui a fallu du temps pour s’adapter puis il a commencé à marquer et là aussi, il part au Japon sans que je le sache. Pendant la trêve, j’étais en vacances dans les Vosges et la direction me dit qu’elle peut faire venir un joueur : Marc Degryse ou Enzo Scifo. J’ai demandé un petit temps de réflexion et finalement, je n’en ai plus jamais entendu parler… Je me suis retrouvé avec Dejan Pekovic comme numéro dix. Je ne suis même pas certain que c’était un joueur de foot car il ressemblait plus à un basketteur. Il a marqué un but parce qu’un équipier lui a tapé un ballon qu’il a sûrement dû dévier de l’oreille…"