Francky Vercauteren préface Standard-Cercle: "Je n'ai jamais eu de contacts avec le Standard"
Franky Vercauteren a ramené l’équipe brugeoise en D1 puis s’en est... allé ailleurs.
- Publié le 11-08-2018 à 07h18
- Mis à jour le 11-08-2018 à 12h49
Franky Vercauteren a ramené l’équipe brugeoise en D1 puis s’en est... allé ailleurs.
S’il n’y avait une démarche quelque peu chaotique - "mes deux genoux sont foutus; je suis bon pour l’opération !" - on aurait tendance à croire que le temps n’a pas de prise sur Franky Vercauteren. De le voir là, assis dans ce lounge qui est devenu, à Tubize, l’endroit privilégié des Diables Rouges, on l’imaginerait en effet en pleine préparation d’un match des Red Devils. Or s’il est là, c’est pour peaufiner la préparation estivale de son nouveau club: Al-Batin, équipe qui évolue au plus haut niveau en Arabie saoudite. Mais pour nous, la priorité, c’est l’analyse de ce Cercle Bruges qu’il est parvenu, la saison dernière, à hisser en première division avant de signifier ses adieux à la direction brugeoise.
Franky, comment vous y êtes-vous pris pour faire remontrer le Cercle ?
"Dans un premier temps, à mon arrivée, j’ai analysé la situation, cherché ce qui était le meilleur pour l’équipe au niveau du jeu et on a beaucoup travaillé au niveau mental avec les joueurs."
Parce qu’il existait une pression bien particulière dans ce club ?
"Une pression liée à l’obligation de remonter en première division. Et cette obligation pesait énormément sur le comportement des joueurs sur le terrain. Car s’il y avait de la qualité dans ce groupe, ce n’était pas non plus la garantie que cette équipe allait survoler le championnat. Donc ma priorité fut de faire de cette équipe un bloc, puis de lui conférer, sur le plan mental, la conviction qu’elle avait les moyens techniques et physiques de sceller cette montée en D1."
De toutes vos expériences comme coach, celle-là était-elle positive ?
"Absolument. Je remercie d’ailleurs Monaco, les dirigeants du Cercle et surtout les supporters de la manière dont ils nous ont aidés à atteindre notre objectif. L’organisation sportive et financière était parfaite, bien meilleure que ce que j’ai pu rencontrer dans d’autres clubs."
Vous aviez conscience, en signant là, de la portée du défi ?
"En fait, en principe, le premier objectif de Monaco, à travers sa mainmise sur le Cercle, est de préparer des joueurs afin qu’ils puissent revenir en Principauté et revendiquer une place de titulaire. Mais la saison dernière, plus encore que cet objectif, j’ai très vite réalisé que la véritable obligation était de remonter en D1. Mon challenge était donc double, et j’ai très vite été conscient des difficultés qui m’attendaient, car contrairement aux idées reçues, le Cercle Bruges avait des qualités sportives, certes, mais pas au point de dominer outrageusement le championnat. Mais on a fini par émerger car l’esprit de groupe n’a pas connu de faille."
Pourquoi, alors, avez-vous décidé de ne pas prolonger l’expérience en Division 1A ? Avez-vous quitté le Cercle Bruges en étant brouillé avec Monaco et la direction brugeoise ?
"Pas du tout. Mais pour continuer l’aventure, j’avais des prétentions sportives et financières. Je les ai exposées et manifestement la direction du Cercle ne souhaitait pas ou ne pouvait pas y répondre. Dans ce cas, il vaut mieux se séparer à l’amiable avant de se brouiller."
Est-ce l’argent qui a été un problème ?
"Pas uniquement. Encore que j’estime que l’argent est la récompense d’un bon travail. J’ai toujours eu pour principe que la qualité, cela se paye !"
Et sportivement, vous étiez gourmand en matière de renforts ?
"Pas gourmand, simplement réaliste. Je connais la D1 belge; je savais ce dont le Cercle avait besoin pour y tenir son rang."
En fait, vous avez donc quitté le Cercle Bruges sans savoir si vous alliez trouver du travail ailleurs ?
"En effet, je n’avais rien. Je n’avais même pas cherché à avoir des contacts."
Le Cercle a-t-il perdu son identité depuis l’arrivée de Monaco ?
"Non, car si Monaco n’était pas arrivé, peut-être que le Cercle n’existerait plus. Or il vit toujours, donc il a gardé son identité. Bien sûr les priorités, désormais, sont plus monégasques que brugeoises. Mais malgré cette transformation, j’ai toujours senti que l’identité naturelle du Cercle était une réalité. On ne gomme pas d’un coup la tradition en signant des accords ! Même si les vrais patrons habitent Monaco et pas Bruges…"
Soyez sincère, des joueurs actuels du Cercle, certains pourront-ils percer à l’AS Monaco ?
"Demain, non. Dans un an ou deux, peut-être. Mais la barre est placée très haut. C’est pas gagné. À moins que Monaco ne persiste dans son projet, qui n’a pas abouti la saison dernière, qu’on forme une équipe B avec le même esprit professionnel que celui qui doit exister dans le noyau A. Moi, j’étais très adepte de ce principe qui est impératif pour celui qui veut vraiment évoluer..."
Le Cercle va-t-il jouer pour la descente ?
"Non, car les joueurs ont été formés par un certain... Vercauteren (rires) . Plus sérieusement, je vois cette équipe jouer dans le ventre mou. Mais ce ne sera pas facile; le maintien ne tombera pas du ciel."
Est-ce une équipe technique ?
"Oui, c’est une bonne combinaison entre technique et physique avec quelques bonnes individualités."
Elle joue à la belge ou à la française ?
"J’espère pour elle à la française puisque la France est championne du monde et nous seulement troisièmes !"
Al Batin, le nouveau défi
Grand voyageur devant l’éternel. Si la Belgique reste cette terre natale où il aime, mais avec parcimonie, se ressourcer sur le plan familial, Franky Vercauteren reste un fervent adepte de l’aventure à l’étranger. Après s’être séparé à l’amiable avec la direction du Cercle, il a fini par accepter les conditions financières et sportives venues d’Arabie saoudite.
"Le club est situé à Hafr, ville qui n’a rien de très touristique, je le concède. Elle est située en plein désert et nous jouons dans un stade de 6.000 personnes, sous une très forte chaleur. Le noyau de l’équipe est composé de nombreux étrangers, essentiellement brésiliens et africains, tous des joueurs dont je dois encore jauger le véritable potentiel, sachant qu’il s’agit, pour la plupart, de transferts récents. Donc j’ai encore du mal à situer le véritable niveau de cette équipe dans un championnat que je vais également découvrir."
Un défi de plus, donc, pour ce Vercauteren voyageur à qui rien ni personne ne fait vraiment peur. "J’ai ma conscience pour moi, c’est elle qui me guide dans le privé comme le sportif…"
"Je n’ai jamais eu de contact avec le Standard"
Il a souvent été cité à Sclessin, mais "en 20 ans, l’occasion ne s’est jamais présentée".
Avez-vous été surpris que Michel Preud’homme revienne au Standard ?
"Pas du tout. Ce retour s’inscrit dans la logique et s’avère d’ailleurs positif pour le football belge. Sachant qu’au niveau des joueurs, nos meilleurs éléments partent à l’étranger, je trouve très constructif que les meilleurs coaches belges restent en Belgique. Cela permet à notre championnat de conserver une certaine identité, celle que Preud’homme va, j’en suis convaincu, entretenir au Standard."
Vous ne pensiez pas qu’il allait prendre la succession de Martinez ?
"Un peu comme tout le monde en Belgique, j’aurais trouvé cela normal. Avant que Martinez ne prolonge son contrat, qui d’autre en effet présentait un meilleur profil que Preud’homme pour gérer le futur des Diables ? Il y avait là une filiation naturelle qui s’imposait."
Preud’homme peut-il offrir un nouveau titre au Standard ?
"Évidemment que oui. Il a l’outil, l’expérience et il peut s’appuyer sur la ferveur d’un public en attente d’un exploit. D’ailleurs, le Standard, comme c’est le cas pour Anderlecht et Bruges, doit avoir pour objectif, chaque année, de remporter le titre."
Le Cercle, ce soir, peut-il troubler cette équipe du Standard ?
"Ce match tombe très bien pour les Brugeois. Le Standard, en effet, est entre deux duels européens qui pourraient l’inciter à ne pas se livrer à fond. Le Cercle, à l’inverse, qui est encore frais, n’a rien à perdre, et ce match constitue une belle vitrine pour quelques joueurs en mal de notoriété. Donc il n’est pas impossible que cette rencontre accouche d’une surprise."
Quels sont les atouts du Cercle pour perturber ce Standard ?
"Son collectif et une qualité technique qui n’est pas à sous estimer. Après..."
Le Standard vous a-t-il contacté pour remplacer Sa Pinto quand ce dernier était remis en question ?
"Faux ! Je n’ai jamais eu de contact avec le Standard. Il y a eu des tas de rumeurs, comme il y en a déjà eu si souvent concernant mon passage à Sclessin, mais absolument rien de concret. Dans la foulée de ces rumeurs, j’ai simplement fait savoir que si on voulait me contacter, on savait où me trouver. Et à partir de là, si c’était le souhait de la direction, on pouvait se mettre à table et parler plus en profondeur. Mais cela ne s’est jamais présenté. Ni la saison dernière, ni depuis 20 ans !"
"La France était meilleure que la Belgique"
Quel est votre jugement sur le parcours de la Belgique au Mondial ?
"Je suis un peu divisé. Je crois qu’on a bien fait les choses, mais on n’a pas gagné !"
La Belgique était-elle la meilleure équipe de ce Mondial ?
"Non ! La meilleure c’était la France, c’est elle qui a gagné. C’est clair, non ? Car quoi que l’on puisse penser en Belgique, en demi-finale, face aux Français, on n’a pas eu les réponses à apporter à l’organisation et au jeu de l’équipe de France…"
Vous avez donc des regrets ?
"Oui, car je croyais sincèrement qu’on pouvait être champion du monde. On avait le potentiel pour l’être. Donc on ne peut qu’être déçus, même s’il faut féliciter nos joueurs pour le résultat obtenu. Simplement, on a peut-être eu la malchance de tomber sur les Français en demi-finale et pas en finale. "
Vous avez été séduit par Eden Hazard ?
"Il m’a étonné, oui, car je ne l’avais jamais vu comme cela. Et c’est son rôle, selon moi, d’être présent dans les grands matches comme il l’a été lors de ce Mondial."