Footgate: "Si j'ouvre ma bouche, Herman Van Holsbeeck est mort"
Les écoutes du Footgate démontrent comment Herman Van Holsbeeck a permis à Mogi Bayat de dribbler Veljkovic.
- Publié le 19-11-2018 à 06h45
- Mis à jour le 19-11-2018 à 08h06
Les écoutes du Footgate démontrent comment Herman Van Holsbeeck a permis à Mogi Bayat de dribbler Veljkovic.
Ce dimanche, cela faisait exactement 40 jours que la justice belge a fait ses premières perquisitions dans l’affaire “Mains propres” . Un des premiers à avoir été entendus était Herman Van Holsbeeck. Après une audition par la police de Louvain qui a duré toute la journée, l’ex-manager d’Anderlecht a été relâché. Sans conditions.
Van Holsbeeck n’a donc pas été inculpé, ni pour fraude fiscale ni pour blanchiment d’argent.
Pourtant, il a traité avec tous les acteurs principaux qui sont encore derrière les barreaux. Les journaux De Standaard et Het Nieuwsblad ont pu mettre la main sur des écoutes de l’enquête Footgate, qui permettent de voir plus clair dans le transfert très obscur de Sofiane Hanni au Spartak Moscou.
Hanni était un joueur de Dejan Veljkovic, l’agent serbe qui est inculpé de participation à une organisation criminelle, blanchiment d’argent et corruption. Mais pour ce gros transfert-là, Veljko est mis sur la touche. C’est Mogi Bayat qui fait le deal.
D’où le coup de fil de Veljkovic à un de ses clients, le 1er février 2018, au lendemain de la fin du mercato. “Herman a perdu les pédales avec Mogi. Il part en fin de saison et veut gagner le plus d’argent possible.”
Le 2 février , Veljkovic a un employé d’Anderlecht au téléphone, qui lui dit : “Si j’ouvre ma bouche, Herman est mort. Ce qui s’est passé avec Hanni, c’est quand même impossible...”
Un peu plus de deux mois plus tard, Van Holsbeeck est viré sur le champ par Coucke. Il doit venir déposer son Audi et est renvoyé comme un malpropre. Les deux hommes n’ont pas pu se mettre d’accord par rapport à la prime de départ. Herman estime avoir droit à… 1,9 million, nous démontre un calcul précis. Via sa société, il facturait chaque mois 55 660 euros (46 000 euros, plus TVA) à Anderlecht. Vu qu’il avait encore deux ans de contrat, cela fait 1,3 million. Mais avec Roger Vanden Stock, il avait convenu d’un bonus de 600 000 euros en cas de mercato lucratif. Voilà pourquoi il doit vendre le plus possible pendant son dernier mercato.
Qui plus est, Marc Coucke avait convenu avec l’ancienne direction que la situation financière du club ne pourrait pas s’empirer au terme du mercato. Cela explique la location avec option d’achat de Kenny Saief de Gand, évidemment réglée par Bayat.
Mais Van Holsbeeck doit surtout vendre. Il ne parvient pas à obtenir plus que 500 000 euros de Zulte Waregem pour Hamdi Harbaoui. Et 3,75 millions, c’est le grand maximum que le Sparta Prague veut débourser pour Nicolae Stanciu, acheté pour 7,8 millions (sans les 2 millions de bonus). Finalement, Mogi parvient à placer Lukebakio chez ses amis de Watford pour 2,5 millions.
Mais ce n’est pas assez. Sofiane Hanni, pourtant auteur d’un triplé au Standard, est l’homme qui devrait faire grimper le jackpot. Via un agent français, Veljkovic avait noué les premiers contacts avec le Spartak Moscou. Mais derrière son dos, Mogi prend les choses en main.
Via David Sesa, l’ex-T2 de René Weiler, il obtient le numéro de téléphone d’un certain Marco Trabucchi, l’agent maison italo-russe du Spartak Moscou. Bayat reçoit le mandat d’Anderlecht et de Hanni et mène les négociations avec le Spartak. La somme de transfert est fixée à 7,1 millions (7,85 millions avec bonus).
Rusé comme il est, Bayat partage son énorme commission avec une dizaine de personnes. Parmi elles : Trabucchi et trois représentants du Spartak, mais aussi les agents Liposki (l’agent de Santini), Siljanoski (ex-Antwerp) et un certain Ken Van Deijck, un Suisse au nom belge, qui auraient été les premiers à parler du Spartak et de la Russie à Hanni.
Même Veljkovic reçoit une part du gâteau pour qu’il ne fasse pas trop de bruit : 70 000 euros. Le montant exact de la commission perçue par Bayat n’est pas connu. Mais elle a surement été énorme. En plus du pourcentage sur le salaire de Hanni (au moins 10 %), il y a les 600 000 euros pour son rôle de représentant d’Anderlecht, plus une grosse commission versée par le Spartak.
C’est cette commission-là qui interpelle les enquêteurs. Ils examinent si l’argent n’a pas transité via la société de Trabucchi, basée dans les Îles Marschall, via des comptes de tiers et des agents proches de Bayat, avant d’aboutir dans ses poches. Est-ce qu’il a ainsi voulu contourner le fisc ou a-t-il profité des lacunes existantes dans notre législation ?
La justice ne dispose pas d’éléments qui permettent de penser que Van Holsbeeck aurait pris une partie de cette commission sur le transfert de Hanni et il a donc été relâché. L’ex-manager du Sporting savait évidemment que ses actes seraient suivis de très près par Marc Coucke…