Felice Mazzù sort son autobiographie: "Le livre de quelqu’un qui a accompli son rêve"
Felice Mazzù se raconte dans le livre Papa, je te promets qu’un jour (Éditions Luc Pire).
- Publié le 20-11-2018 à 06h55
- Mis à jour le 20-11-2018 à 09h52
Felice Mazzù se raconte dans le livre Papa, je te promets qu’un jour (Éditions Luc Pire).
"Ce n’est pas une biographie mais plutôt un récit."
En prenant la parole, en prélude de la présentation du bouquin de Felice Mazzù, qui vient de sortir aux éditions Luc Pire et qui était présenté, lundi soir, à la Manufacture urbaine de Charleroi, Pierre-Yves Hendrickx (le directeur administratif du Sporting) a trouvé les mots justes pour résumer, en quelques mots, l’ouvrage écrit par Jean Derycke. "Où on en découvre beaucoup sur l’homme intègre, honnête, juste et droit que Felice est et a toujours été." Ce qui a évidemment fait sourire le principal intéressé.
Felice, d’où vient cette idée d’écrire un livre ?
"Cela faisait un certain temps, depuis que j’ai la chance d’être dans le milieu du football professionnel, que j’avais envie d’écrire un livre. Je ne savais pas trop comment m’y prendre. Mais j’ai eu la chance de croiser Jean Derycke, qui est journaliste pour le quotidien L’Avenir et qui suit Charleroi depuis que je suis présent. Un beau jour, il m’a simplement dit : ‘Tu n’as pas envie d’écrire un livre ? J’ai des idées…’ Et j’ai tout de suite sauté sur l’occasion pour lui dire ‘Oui, oui, oui, oui, oui’ . Et Jean, avec sa simplicité, sa manière d’écrire et d’être, m’a donné envie de partager avec lui. Il a beaucoup de sensibilité. Et la manière dont je me suis raconté, il l’a retranscrite de manière simple et attachante."
Ce n’est pas trop dur de parler de soi ?
"Je n’avais pas spécialement envie de parler de moi. L’objet principal était de lancer un message à tous les gens comme moi, de la région de Charleroi ou non, qui ont démarré leur vie en tant qu’enfant, de manière très simple. Mes parents, arrivés en Belgique depuis l’Italie, ont travaillé beaucoup. C’était aussi une manière de les remercier. Je voulais faire passer le message que dans la vie, rien n’est impossible. Car quand j’ai dit que je voulais réussir comme entraîneur, j’ai été beaucoup moqué. Mais ce n’est pas une vengeance. Ces moqueries m’ont donné une force supplémentaire pour gravir certaines étapes. Mais ça ne veut pas dire que je suis quelqu’un qui a réussi. Je suis simplement quelqu’un qui a accompli le rêve qu’il s’était fixé, au travers de la rencontre de beaucoup de personnes. Car lorsqu’on veut atteindre un objectif, on a besoin des autres."
Il y a un mot qui revient souvent dans le livre, c’est le mot amour.
"Effectivement. Ce mot est présent souvent. Peut-être que tout ce que je fais, j’ai besoin de recevoir et d’en donner car je n’en ai peut-être pas eu assez, étant enfant. Et ce n’est pas une critique. C’est tout simplement une manière de fonctionner chez mes parents."
Dans un chapitre, vous expliquez également avoir peur de vieillir. Est-ce que l’écriture de ce livre vous a rassuré ?
"J’ai tout simplement été franc et honnête en disant cela. Je pense que pas mal de personnes partagent ce sentiment. Le livre ne m’a pas aidé à rester jeune mais quand j’ai peur de vieillir, je dis cela par rapport à plein de choses que j’aurais pu faire et que je n’ai pas faites. Il ne me reste plus beaucoup de temps pour les faire. Le livre ne résout pas tous les problèmes. Être entraîneur de football prend beaucoup de temps. Mais en fait perdre, aussi."
Le titre "Papa, je te promets qu’un jour" est évocateur.
"Le titre, et j’espère que tout le monde le comprendra, ne veut pas dire : ‘Papa je te promets qu’un jour je serai entraîneur.’ C’est bien plus profond. C’est peut-être une petite revanche par rapport à mes parents et à la manière dont ils sont arrivés en Belgique. Ils ont fait beaucoup de sacrifices pour leurs enfants. Et c’est déjà une grande réussite. Je ne veux pas qu’on pense que j’ai réussi à faire faire quelque chose que mon père n’a pas réussi à faire. Surtout pas. J’ai simplement eu la chance de faire des études et j’ai accompli ce que j’avais envie de faire. Tout simplement."
Vos proches ont-ils appris des choses en lisant le livre ?
"Oui. Julie, ma femme, en a appris. Mes parents, aussi, notamment lors du passage qui évoque mon service militaire (rires). J’avais envie de tout dire, de me lâcher et de faire passer certains messages. J’espère avoir réussi à le faire."
Une traduction en néerlandais est-elle possible si vous franchissez la frontière linguistique en tant que coach ?
"J’espère qu’on peut en faire une… même si je ne passe pas la frontière linguistique. J’ai également proposé de le traduire en italien, si la possibilité se présente, pour que les Italiens d’Italie puisse le lire, éventuellement se reconnaître et comprendre mes messages."
À la cave, coup de boule et histoire de SMS
L’autobiographie de Felice Mazzù est remplie d’anecdotes qui permettent d’en savoir plus sur la personnalité du coach zébré.
Tantôt drôle, parfois touchante mais surtout sincère. La lecture de l’autobiographie nous en apprend beaucoup sur la personnalité du coach de Charleroi, fils d’immigré italien qui a tout fait pour que le nom Mazzù ait une consonance positive. Extraits.
Mazzù le voleur. À 11 ans, le petit Felice s’est fait prendre la main dans le sac par l’épicier du village, alors qu’il tentait de piquer un bonbon. "L’épicier m’a pris la main, j’étais pétrifié", raconte-t-il. "Il est venu avec moi jusqu’à la maison pour expliquer à mon père ce que je venais de commettre. Mon père m’a mis contre un mur, les bras en croix. Avec les poignets attachés à une corde retenue par des clous de chaque côté. Je suis resté au moins deux heures comme ça, dans le noir le plus total. J’ai crié et pleuré toutes les larmes de mon cœur. Et par la suite, je n’ai plus jamais rien volé."
Mazzù le fêtard. Ceux qui le connaissent n’ont pas été étonnés. Mais Felice Mazzù est un bon vivant. La preuve avec cette anecdote, lors de son service militaire en Allemagne. "En semaine, j’alignais les fêtes, parfois plus folles les unes que les autres. J’ai notamment découvert le fameux Rosenmontag, ce lundi de carnaval où les femmes prennent le pouvoir et font ce qu’elles veulent des hommes. Oui, certaines femmes ont fait ce qu’elles voulaient de moi, jeune athlète fraîchement débarqué de Belgique, qui avait son petit succès. Je résume : je dormais la journée pour être prêt à sortir le soir. Du moment que j’étais présent au salut du drapeau le matin, c’était bon."
Mazzù le dragueur. Durant son adolescence, Felice Mazzù avait son petit succès avec les filles, même avec les plus âgées. "Un jour, au Hit Club, à la Ville Basse, une grande blonde âgée de dix ans de plus que moi m’a demandé de lui offrir un verre. J’avais l’impression d’être le roi du monde. Puis on me tape sur l’épaule, je me retourne et là… je me prends un énorme coup de boule en plein visage. La femme voulait rendre son petit ami jaloux. Et vu l’état de mon nez, ça avait marché…"
Mazzù le buteur. Durant sa modeste carrière de joueur, Felice Mazzù n’a pas marqué beaucoup. Mais il se souvient particulièrement d’un but inscrit lors d’un test à Moustier-sur-Sambre, en 2e provinciale. "J’avais fait un match de dingue. Je jouais milieu défensif et j’ai marqué le plus beau but de ma carrière : une demi-volée des 30 mètres en pleine lucarne. Si, si ! Et je me suis retrouvé avec un beau petit contrat pour arrondir mes fins de mois…"
Mazzù et le Standard. Depuis le début de sa carrière, Felice Mazzù a dit non au Standard à trois reprises, dans des circonstances à chaque fois différentes. Mais l’histoire qui a le plus marqué le public, c’est celle des SMS, qu’il détaille dans le bouquin. "J’avais envie d’être valorisé, encore plus reconnu. D’avoir un petit coup de pub, de gloriole", avoue-t-il. "Mais je n’avais aucune envie de quitter Charleroi." Ce qu’il n’a finalement pas fait.
Mazzù, l’amoureux et le papa. Felice Mazzù a connu deux histoires d’amour (avec Véronique, une monitrice de sport avec qui il a vécu sept ans, puis Pascale, une volleyeuse) avant de rencontrer puis d’épouser Julie en 2011. "Avec elle, l’attirance était réciproque et on peut parler de coup de foudre", explique celui qui aurait aimé être un papa différent pour ses deux enfants, Nando et Luna. "Je tente de les gâter comme je peux, je veux qu’ils ne manquent de rien. Je sais que je suis un père trop peu présent pour eux mais j’espère qu’ils ne m’en veulent pas."
"Pas là pour lui passer la pommade…"
Jean Derycke, l’auteur du bouquin, ne le cache pas. "On a passé quelques bons moments, avec Felice."
Au total, il aura fallu une douzaine de rendez-vous de deux à trois heures entre les deux hommes pour que Felice Mazzù se raconte. "Mais quand il est lancé, c’est difficile de l’arrêter (sourire). Ce livre est un parcours de vie, qui aborde des choses légères, d’autres plus graves. Tout en résumant la personnalité de Felice."
Que le journaliste pour les éditions de L’Avenir connaît bien, puisqu’il est suiveur du Sporting carolo au quotidien. "Mais dès le départ, c’était très clair pour moi comme pour lui ; on devait faire la part des choses. Ce n’était pas un bouquin de football. D’emblée, on a fixé cela. Il fallait qu’il se raconte, même s’il y avait des côtés moins reluisants. Le but n’était pas de lui passer de la pommade… Après, il est clair que nous avons partagé certaines choses qui ne sont pas nécessairement celles qu’un journaliste partage avec un entraîneur. Mais tout était clair et cela ne m’a pas empêché de continuer à poser mes questions habituelles sur la composition d’équipe en conférence de presse (sourire)."
"Je confirme", souriait à son tour Mazzù. "On n’a pas mélangé les choses…"