Van Himst félicite Deschacht : "Bravo Oli ! Dans 100 ans, tu auras encore ce record !"
Paul Van Himst ne déplore pas que Deschacht rattrape ses 566 matches.
- Publié le 29-10-2016 à 12h48
- Mis à jour le 29-10-2016 à 13h02
Paul Van Himst ne déplore pas que Deschacht rattrape ses 566 matches. Si Olivier Deschacht (35 ans) joue au moins une minute à Waasland-Beveren, il égalera le record de 566 matches officiels de Paul Van Himst (73 ans) sous la vareuse d’Anderlecht. Van Himst aurait aimé accueillir Deschacht chez Brésor, sa société familiale qui produit et vend du café. Trop modeste, Oli a refusé l’invitation.
Vous savez qu’il est gêné de rattraper et bientôt dépasser un monument comme vous, Paul ?
"Cela ne m’étonne pas. Pourtant, il ne devrait pas être embêté. S’il a joué 566 matches, c’est qu’il l’a mérité. Il y a des choses plus graves dans la vie. Comme la perte de mon épouse, il y a trois ans… Je suis même content que ce soit un Belge qui bat mon record. J’ai toujours bien aimé Oli . Il vient d’une famille aisée. Cela dit, lui et son papa se sont toujours montrés humbles."
Qui mérite le plus le surnom de Mister Anderlecht ?
"On le portera tous les deux (Rires) . On a eu des carrières atypiques. Oli a dû se battre pour chacun des 565 matches. Il les a joués grâce à son caractère de guerrier et à son hygiène de vie. Il a toujours dû prouver qu’il était meilleur que les arrières gauche qu’Anderlecht achetait. Moi, je peux dire en toute modestie que j’avais plus de talent qu’Olivier. Je ne devais pas me battre comme lui, mais je devais essayer de rester le meilleur."
Deschacht aurait-il été titulaire dans le grand Anderlecht de Van Himst ?
"Les temps ont tellement changé. Jean Cornelis était un arrière gauche comme lui : techniquement un peu limité mais on pouvait toujours compter sur lui. Thissen était plus puissant : il était un cran au-dessus. Dans ma période d’entraîneur au Sporting, j’avais De Groote et ensuite Andersen à l’arrière gauche. Michel était un joueur valable mais pas exceptionnel. Hendrik était le meilleur de tous : il était rapide, avait la technique, un bon centre… Et Oli ? Plus il vieillissait, meilleur il devenait. Son atout était sa régularité. De temps en temps, il faisait quelque chose de spectaculaire, mais c’était rare."
Avez-vous eu pitié de lui, le week-end passé à Bruges, quand il jouait sur le flanc droit ?
"Oui, quand même. Il a montré sa bonne volonté en jouant à droite, mais c’était un peu risible. Là, on voit que Weiler ne connaît pas encore ses joueurs. Je ne crois pas qu’il le fera encore."
L’affaire des paris aurait pu mettre un terme précoce à sa carrière, mais Anderlecht ne l’a pas abandonné.
"Chapeau au Sporting. Cette décision témoigne de la grande classe du club. Il n’aurait pas mérité cela. C’est scandaleux que ce gardien de Beveren (NdlR : Henkinet) se soit fait virer. Mon petit-fils mise parfois aussi cinq euros sur quelques matches. Et à la télé et sur les maillots, on ne voit que de la pub pour des sites de paris sportifs. Les joueurs jouent parfois entre eux, pour rigoler…"
Vous avez gardé votre record pendant 41 ans. Oli peut-il le conserver 100 ans ?
"Oui ! Selon moi, il le gardera pour toujours. Des clubmen comme lui, cela n’existe plus ! Après quelques bonnes saisons, ils partent à l’étranger."
"Au RWDM, Boskamp ne m’a pas parlé pendant six mois"
Van Himst aurait pu jouer plus de 566 matches à Anderlecht. "J’avais encore un an de contrat, mais je crois que l’entraîneur qui arrivait, Hans Croon, avait dit qu’il ne savait rien faire avec moi", dit Van Himst. "Au fond, j’aurais dû rester."
Mais il y avait de l’intérêt d’autres clubs. Van Himst : "Roger Petit, du Standard, est venu parler chez moi. Eddy Wauters, de l’Antwerp, me voulait, comme le Lierse. Mais je suis parti au RWDM; c’était plus proche. Un journaliste m’avait mis en contact avec Michel Verschueren, qui était au RWDM, et m’a convaincu. C’était une erreur."
Son échec à Molenbeek - champion la saison d’avant - avait plusieurs raisons. "Premièrement, j’ai été opéré au genou. Avant mon dernier match avec Anderlecht - la finale de la Coupe contre l’Antwerp (1-0, but de Denul), j’ai senti mon ménisque se bloquer à l’échauffement. Le kiné l’a débloqué et j’ai joué, mais j’ai continué à avoir mal."
Puis, il avait des problèmes familiaux. "J’ai perdu mes deux parents, cette année-là."
Mais surtout : il était anderlechtois et pas molenbeekois. "Psychologiquement, j’avais du mal à porter les couleurs d’une autre équipe bruxelloise…"
Johan Boskamp ne voulait pas de lui. Selon la légende, il n’a pas parlé avec Van Himst pendant six mois. "C’est vrai ! Il était le grand boss du vestiaire. C’était une catastrophe pour moi. Si j’avais su cela, je n’aurais jamais signé. Mais à la mi-saison, le délégué nous a réunis. Nous sommes devenus camarades. Mais j’ai quitté Molenbeek après une saison pour aller à Alost. Là, je n’étais plus bon. Ma carrière était terminée."
"L’équipe titrait : ‘Van Himst, le Pelé blanc’"
Parmi ses plus beaux souvenirs, il y a le 3-3 au Real et les rencontres avec le vrai Pelé.
566 matches, cela signifie des dizaines de souvenirs magnifiques. "Je me souviens de mon premier match en équipe A comme si je l’avais joué hier", dit Van Himst."C’était à Beringen, à la Noël. J’avais 16 ans, Stockman était blessé. C’était l’époque après Mermans. Anderlecht avait perdu sept ou huit matches. Les patrons Roossens et Steppé voulaient rajeunir l’équipe. On avait gagné 1-4. Quelques jours plus tard, après le Nouvel An, j’ai inscrit mon 1er but, contre Gand."
Et son premier grand moment européen ? "Le 3-3 au Real Madrid de Puskas, Di Stefano et Gento. C’était mon premier match européen et j’ai marqué. Le Real avait gagné cinq Coupes d’Europe de suite, mais l’équipe était sur son retour. On lui a donné le coup de massue."
Le Real a d’ailleurs montré de l’intérêt pour Van Himst. "Le club cherchait un remplaçant pour Di Stefano. Mais c’était une autre époque. Et je jouais dans une grande équipe; j’avais trois enfants à un jeune âge, j’avais un job administratif dans la société de Roossens, où je travaillais chaque matin... J’étais heureux en Belgique."
Un autre grand moment était un match en équipe nationale entre la France et la Belgique. "On avait gagné 0-2 et ce soir-là, tout me réussissait. Le lendemain, L’Équipe titrait : Van Himst, le Pelé blanc’."
Pelé n’est d’ailleurs pas un inconnu pour Van Himst. "Je l’ai affronté plusieurs fois. Soit au Tournoi à Paris, ou il venait avec Santos. Soit lors de matches amicaux à Anderlecht."
Les deux se sont invités mutuellement. "Il est venu à mon match de gala pour fêter mes 15 ans en équipe première d’Anderlecht. Il y avait aussi Cruijff, Eusebio et van Hanegem dans la sélection mondiale. Hélas!, il pleuvait. Moi, j’aurais voulu qu’on fasse match nul. Mais dans mon équipe, il y en avait trop qui voulaient gagner (Rires). On a battu Pelé 5-4."
Et en 1980, Van Himst a tourné dans le film ‘Escape to Victory’ (‘À nous la victoire’) de Pelé, avec Sylvester Stallone, Bobby Moore et Ardiles.
"Les tournages ont duré un mois et avaient lieu à Budapest. Le soir, on allait manger ensemble. Ce sont des souvenirs inoubliables."
Van Himst a un fan club en Chine
Paul Van Himst a beau avoir arrêté sa carrière, il est encore connu parmi les jeunes. "Même en Chine !", sourit-il, avant d’ouvrir une enveloppe. "Chaque année, je reçois une lettre de quelques jeunes Chinois qui ont créé un fan club, les ‘Van Himst Boys’. D’abord ils étaient deux, maintenant ils sont cinq. Ils m’appellent ‘Super Captain’. Je leur renvoie chaque année une lettre de remerciements."