Iachtchouk: "Coacher est bien plus difficile que jouer"
Coach des U14 d’Anderlecht, Oleg Iachtchouk évoque sa nouvelle vie. Entretien.
- Publié le 07-02-2015 à 22h19
- Mis à jour le 08-02-2015 à 22h27
Coach des U14 d’Anderlecht, Oleg Iachtchouk évoque sa nouvelle vie. Après qu’il ait quitté le Cercle Bruges et la D1, Oleg Iachtchouk a quelque peu disparu des radars médiatiques. L’Ukrainien le plus célèbre d’Anderlecht réalise pourtant du très bon boulot dans sa nouvelle carrière d’entraîneur des U14 du RSCA.
C’est au BX Brussels que tout s’est achevé pour Oleg Iachtchouk. "Il n’est jamais simple d’arrêter le football du jour au lendemain , confie-t-il . Je me dis que j’aurais pu encore jouer au top mais l’année au BX fut difficile. Nous avions bien commencé mais l’organisation ne suivait pas vraiment. Nous n’avions parfois pas le terrain ou pas accès aux vestiaires. Le projet aurait dû être mieux cadré car il y avait du talent dans l’équipe mais pas de réel groupe."
Et puis, Anderlecht a débarqué…
"C’était une belle occasion de revenir au bercail. Je ne pouvais pas la laisser passer. Nous discutions depuis un moment avec Anderlecht qui m’avait dit que je serais toujours le bienvenu. L’équipe des U14 avait besoin d’un coach et me voilà."
Vouliez-vous devenir entraîneur ?
"Je ne savais pas ce que j’allais faire. Je voulais continuer à jouer encore des années mais une carrière passe trop vite (rires). Je n’avais jamais pensé devenir entraîneur de jeunes. Je ne savais pas en quoi consistait le job et j’ai eu beaucoup de mal à mes débuts. Je peux vous le dire, il est plus difficile d’être coach des U14 que joueur professionnel. Quand tu joues, tu as tes entraînements et basta. Ici, je dois penser à plein de choses. Je ne m’arrête jamais."
Vos journées sont bien chargées !
"Je conduis mes enfants à l’école avant de préparer l’entraînement de 11 heures avec les premiers groupes. Une heure et demie plus tard, arrive le second groupe. Je peux rentrer chez moi après la session et avant d’aller chercher mes filles. Je file ensuite donner une dernière séance à mon équipe en soirée. Heureusement, le vendredi signifie congé et je peux donc faire tout ce que je n’ai pas pu en semaine."
Que pouvez-vous apporter à ces jeunes ?
"À leur âge, ils ont encore un long chemin à parcourir. Je refuse donc toujours de juger qui à un plus gros potentiel car tant de choses peuvent encore se passer dans les années à venir. C’est plus tard qu’ils seront prêts. J’essaie de leur inculquer ce que j’ai connu chez les pros comme la gestion des blessures, par exemple."
Donnez-vous vos astuces aux attaquants ?
"Je leur explique comment courir vers le but afin d’arriver à pleine vitesse. Ils dépassent ainsi leur défenseur."
Vos joueurs se souviennent-ils de vous ?
"Ils sont nés en 2001 et peu m’ont vu jouer. Ils savent que j’étais pro et aiment donc quand je joue avec eux. Et pour être honnête j’aime participer, me donner à fond avec eux."
Travaillez-vous plus leur technique que la tactique ?
"La technique est importante pour leur développement mais ils ont besoin d’avoir des bases tactiques pour évoluer. Je leur dis où se placer, comment courir, etc."
Quand on est joueur on peut se permettre de ne penser qu’en termes individuels mais vous devez désormais élargir votre vision des choses, n’est-ce pas trop difficile ?
"La gestion du groupe est la chose la plus complexe de ma nouvelle fonction."
Comment ça ?
"Ce sont des gamins et ils veulent tous jouer. Quand l’un ou l’autre ne fait rien à l’entraînement, j’ai une bonne raison de lui préférer son remplaçant mais si mes 18 joueurs travaillent bien, je dois trancher et faire des choix qui engendreront des mécontentements."
Il faut garder les gars motivés…
"Voilà ! Certains baissaient les bras et je fais de mon mieux pour leur faire comprendre qu’il faut continuer à bosser. Il leur arrivera d’être réserviste ou même non-sélectionné. Je pense qu’ils comprennent qu’il s’agit aussi d’un apprentissage de la gestion de la concurrence."
Pour la plupart, votre personne est synonyme de gentillesse. Est-ce le cas quand vous entrez dans votre costume de coach ?
"Je suis quelqu’un de très strict. Doucement, je me permets de rigoler quand le moment est propice. Après, quand il faut bosser, je suis concentré sur mon travail. Mieux vaut serrer un peu trop la vis que pas assez. Parfois, les jeunes sont trop habitués à être encensés. Je veux les rendre meilleurs et je ne vais pas les féliciter pour leur faire plaisir. Quand ce n’est pas bien, il faut le dire."
"Tu te souviens des 4 buts contre Salzbourg ?"
En 10 ans à Anderlecht, Oleg Iachtchouk a tout vécu. Des victoires aux déboires, l’enfant chéri du Parc Astrid revient en arrière. "Le public aimait le fait que je mouille le maillot. J’ai peut-être tellement donné que je me suis souvent blessé. On m’a régulièrement dit que c’était la fin, surtout après ma dernière opération. J’ai alors décidé d’arrêter l’équipe nationale et je me suis promis de jouer en D1. Ce fut chose faite. Mon dernier match était d’ailleurs le jour de mon anniversaire."
Après tout ce qu’il a vécu, l’Ukrainien ne peut être que satisfaire de sa carrière. "Je ne me plains pas car si j’avais pu faire mieux sans mes blessures, j’aurais pu ne jamais vivre tout ça."
Son plus beau souvenir date de la saison 1997-1998. "En Coupe Uefa, nous avions perdu 4-3 sur la pelouse du Casino Salzbourg. Au retour, nous étions menés 0-2 à la pause. Et tu te souviens du score ? 4-2 ! Nous avons marqué 4 fois en 20 minutes. J’ai inscrit un but dans chaque rencontre, c’était génial."
L’Ukrainien a connu 4 titres et 4 campagnes de C1. Il a d’ailleurs inscrit un but en Ligue des Champions. "J’ai marqué contre le Werder Brême mais on a été ridiculisés par la suite. Ça reste un sentiment amer. La campagne 2000-2001 reste un énorme souvenir. Qui aurait cru ça ? On avait pris des claques contre Manchester United et Kiev mais on a tout gagné après. Et au second tour, tu débutes par un 1-0 face à la Lazio. C’était incroyable. Je me souviens encore du coup franc de Sinisa Mihajlovic sur la latte. Quelle frappe !"
Avec ces belles affiches, il comprend ce que vivent parfois les Mauves . "Ce n’était pas simple de se remobiliser le week-end contre un plus petit club qui, lui, est à 200 %. Mais si Anderlecht aborde tous ses matches comme des grosses rencontres européennes, il gagne toujours."
"On aurait pu être la surprise avec le Cercle"
Après Anderlecht, Oleg Iachtchouk est passé dans les rangs du Cercle Bruges.
Du top, il est passé à un club condamné à se battre contre la relégation. "C’est ce qu’on pensait de nous quand je suis arrivé mais nous avons passé la majeure partie de la saison dans le Top 3 . Nous avions un superbe quatuor offensif. Nous avions tous 10 buts au compteur. Le nombre de supporters avait plus que doublé. On était la meilleure attaque et la meilleure défense. Après ça, cela s’est décanté et après quelques années, on ne comptait plus sur moi."