Aux yeux de la France, Kevin Mirallas est né le 7 mai 2005. Un match de fin de saison où Claude Puel lance son jeune attaquant arrivé quelques mois auparavant et qui inscrit un but capital dans la course à la Ligue des Champions.

Trois minutes après son entrée en jeu face au Paris SG, Mirallas marque, devenant à 17 ans, 7 mois et 2 jours le plus jeune buteur de l’histoire du club jusqu’à qu’un certain Eden Hazard ne le détrône. À l’époque, le football n’est pour lui qu’une passion.

Le Kevin actuel pose d’ailleurs un regard sans concession sur celui qu’il était. "Depuis, j’ai appris que le monde professionnel, ce n’était pas un jeu mais un métier avec des exigences. J’allais à l’entraînement; je rentrais jouer à la console. Ce n’était pas pareil. Je ne le vivais pas comment je le vis maintenant. C’est ma passion et mon métier, je vis à fond le foot alors qu’avant, c’était différent" , nous confiait-il en début de saison. "Si Claude Puel devait m’entraîner maintenant, il serait très surpris… Il était exigeant. Avant, je le pensais fou on va dire. Mais vu ma philosophie de travail, on s’entendrait très bien maintenant."

De Lille où il a découvert la Ligue des Champions et un statut de titulaire, Mirallas garde forcément des bons souvenirs, sportifs comme extrasportifs. À Saint Etienne, où il est passé ensuite de 2008 à 2010, l’expérience apparaît plus mitigée. Loin de la stabilité lilloise où, en quatre ans, il n’avait connu qu’un seul entraîneur, Claude Puel, l’attaquant découvre un environnement plus complexe et évolue sous les ordres de Laurent Roussey, Alain Perrin et Christophe Galtier. Mais cette expérience l’a forgé.

"Avant, quand on me disait quelque chose, c’était toujours moi qui devais avoir raison. Quand quelque chose n’allait pas, c’était toujours la faute des autres. À Saint Etienne, les trois quarts des choses étaient de ma faute; le reste était pour le club qui n’a pas tout fait pour que je sois dans les meilleures dispositions. Mais c’est le football; j’ai appris à vivre avec cela et je m’en rends compte que c’est partout pareil : on n’a rien sans rien."

Le Grec

Quand, en juin 2010, Mirallas est prêté avec option d’achat à l’Olympiacos, l’attaquant arrive à un premier virage de sa carrière. Beaucoup sont ceux qui pensent que ce départ a tous les attraits d’un enterrement de première classe. Mais ce sera tout le contraire.

"Ce départ en Grèce a été une révélation. Les deux années à Saint Etienne m’ont fait beaucoup de bien dans le sens où j’ai appris de certaines erreurs que j’ai faites. Je me suis dit : voilà, maintenant t’es à un tournant. J’ai 22 ans, je reste sur un échec à Saint Etienne que personne n’attendait. Je ne voulais pas d’un deuxième échec; je voulais montrer à tout le monde que c’était une erreur" , se remémore-t-il.

Loin de la France où il avait grandi et où il baignait dans une certaine forme de confort, l’attaquant fait le choix de se recentrer sur son premier cercle. "J’avais vraiment besoin de couper. Cela faisait 7 ans que j’étais là-bas. J’avais fait le tour de la question et j’avais besoin de connaître quelque chose d’autre. Partir loin de ma famille, juste avec mon épouse, m’a fait beaucoup de bien."

En Grèce, Mirallas réalise aussi ses plus belles saisons. Lui qui ne jurait que par l’axe se découvre sur les côtés ou dans un rôle d’attaquant de soutien sous les ordres d’Ernesto Valverde dont il partage la philosophie joueuse. 14 buts la première année où il remporte le titre, 20 la seconde avec un doublé Coupe - championnat, les lauriers de meilleur buteur et meilleur joueur du championnat : le Liégeois prend une dimension supérieure. Lui qui était arrivé sur la pointe des pieds en Grèce quitte le pays avec l’étiquette de valeur sûre, en témoigne les 8 millions d’euros investis sur lui par Everton en août 2012.

L'Anglais

Une fois encore, un certain scepticisme accompagne le choix de Kevin Mirallas de signer en Angleterre. Nombreux sont ceux qui l’auraient davantage vu en Espagne qu’en Angleterre. Mais une fois encore, le Liégeois démontre qu’il maîtrise l’art du contre-pied.

"Au début, je suis arrivé un peu sur la pointe des pieds; je ne connaissais pas beaucoup de choses sur le club. À mon arrivée, Marouane Fellaini m’a beaucoup aidé pour mon adaptation. Tout de suite, j’ai pris mes marques, je me suis senti à l’aise avec l’équipe. Et avec les supporters, tout s’est bien passé. J’ai été présenté avant le match contre Manchester United devant un stade plein. Cela m’a beaucoup aidé. Pour moi, c’était clair. J’étais sûr de faire le bon choix car c’est un championnat que j’aime beaucoup. J’ai travaillé. Il y a des matches où ce n’était pas simple, où j’ai senti qu’il fallait que je bosse sur certains points et c’est ce que j’ai fait comme sur le jeu de tête et la combativité. On sait que c’est très engagé ici. Ce n’est pas vraiment un domaine qui colle à mes qualités premières. C’était un peu compliqué au départ mais j’ai réussi à travailler là-dessus et à franchir un cap. Maintenant, j’arrive à faire la part des choses entre un beau dribble, un beau tacle ou un geste défensif pour l’équipe. Je peux alterner un bon dribble et un bon replacement défensif pour l’équipe et je pense que c’est plus efficace."

Dans un championnat intense, Mirallas connaît pour la première fois quelques pépins physiques, enchaînant les blessures à son arrivée.

"Venir ici et voir l’équipe jouer sachant que je ne pouvais rien faire était difficile à accepter. J’ai pris sur moi; il fallait bien se reposer et travailler comme le voulaient le docteur et le préparateur physique. Quand on a vu que je rechutais, Daniel Van Buyten m’a conseillé de voir le médecin du Bayern Munich car il m’a dit qu’il allait certainement trouver le problème. Le problème venait de mon dos; on a beaucoup travaillé. J’ai vraiment le dos cambré et cela tire sur tous mes muscles dont les ischios. C’est pour cela qu’à la fin des matches, j’avais mal et je ne m’en rendais pas spécialement compte. Avec la répétition des matches, on a trouvé ce problème récurrent. On a fait un gros travail physique là-dessus."

Le Diable

Deux buts lors de ses deux premières sélections. Face à la Serbie et au Kazakhstan à la fin de l’été 2007, Mirallas signe des débuts retentissants qui, dans un contexte morose, le propulsent au rang d’homme providentiel, le tout à même pas 20 ans…

"Arriver en équipe nationale avec 2 matches et 2 buts, c’était super. C’était parfait même si j’arrivais dans un groupe un peu difficile où il y avait des tensions, des sélectionneurs qui venaient, d’autres qui partaient. Ce n’était pas facile à gérer. Je n’étais peut-être pas préparé à tout cela. Tout le monde m’a mis un peu là-haut. Peut-être que moi aussi, j’y ai cru trop vite et que j’ai relâché certaines choses."

Du haut de ses 26 ans, Mirallas n’est plus le petit jeune qui monte mais bien le joueur le plus expérimenté du compartiment offensif. Un joueur qui a mûri aussi, en témoigne ce qu’il a vécu en Écosse. À Glasgow, l’attaquant s’attend à être titularisé mais il débute sur le banc avant de signer son entrée en jeu d’un but.

"Les 10 minutes suivant la théorie, j’étais vraiment très énervé. Mais j’ai parlé avec Daniel, ma femme. Je représente mon pays : je ne peux pas me permettre de rentrer 10 minutes et de faire n’importe quoi. Il y a une qualification en jeu, tout un pays qui attend cela, il faut y penser. Il y a 4 ou 5 ans, j’aurais boycotté ces 10 minutes (sourire) . Mais voilà, le coach a été joueur et sait ce que c’est. Ce qui est bien avec lui, c’est qu’on va avoir une discussion d’homme à homme ensuite. Il a vu à mon visage que j’étais dégoûté. Ce qui est normal, c’était comme les autres qui ne jouaient pas. Ils étaient autant dégoûtés que moi. Il est tout de suite venu me parler; cela m’a fait du bien. Je lui ai dit que je ne lâcherai pas, que si je devais rentrer, j’allais marquer. C’est ce qu’il m’a dit et c’est ce qu’il s’est passé."

Et l’attaquant de revenir sur cet épisode : "Avant le match, j’étais en train de mettre mes chaussures et il m’a dit ‘ce sont tes chaussures qui vont te faire marquer’. Je lui ai dit ‘ si je joue, c’est sûr’. Il a rigolé et m’a dit de me tenir prêt."

CV express

Kevin Mirallas Né le 7 octobre 1986, à Liège En 5 points

1 Lille (2004-08) : 95 matches, 12 buts

2 Saint Etienne (2008-10) : 69 matches, 5 buts

3 Olympiacos (2010-12) : 71 matches, 34 buts

4 Everton (depuis 2012) : 70 matches, 18 buts

5 Sélections (depuis 2007) : ...