Le psy des Diables se confie: "Martinez est un modèle, Wilmots pensait tout savoir sur le haut niveau"
Jef Brouwers, psychologue des Diables Rouges et du Team Belgium, explique pourquoi il adore travailler avec le nouveau sélectionneur.
- Publié le 11-01-2018 à 11h29
- Mis à jour le 11-01-2018 à 11h30
Jef Brouwers, psychologue des Diables Rouges et du Team Belgium, explique pourquoi il adore travailler avec le nouveau sélectionneur. L’arrivée de Roberto Martinez a marqué le retour d’une vieille connaissance : Jef Brouwers. Mis de côté par Marc Wilmots, le psychologue du sport retravaille avec l’équipe nationale depuis une quinzaine de mois.
Le moment est donc idéal pour tirer, avec lui, un premier bilan de son travail aux côtés de Roberto Martinez.
Comment se déroule la collaboration avec le nouveau sélectionneur ?
"C’est très simple : je donne mes idées et il en fait ce qu’il veut."
Il ne vous appelle jamais ?
"Si si. Parfois il vient à moi et parfois, c’est l’inverse. Quand je pense que je peux aider en donnant un conseil, une analyse, je le fais."
Vous êtes son conseiller, en quelque sorte…
"Pas officiellement. On ne parle pas en ces termes. Quand on se contacte, on discute et il retire ce qu’il veut de mon discours. De temps en temps, je vois ou je sens qu’il applique les conseils que je lui ai prodigués."
Il ne vous envoie jamais sur les roses ?
"Je peux lui dire ce que je veux. Il accepte toutes mes remarques. Il récolte toutes les idées possibles et en fait quelque chose d’intéressant, qu’il pense utile dans l’optique de la victoire."
Donc, son fameux "J’ai retiré beaucoup d’informations de ce que j’ai vu" n’est pas une ruse pour botter en touche ?
"Il prend vraiment les infos. Et ce qui est encore plus fort, c’est qu’il les partage avec son staff et ses joueurs. C’est un modèle pour beaucoup de coachs. Il est très fort dans son indépendance de pensée. Il a été critiqué, certains de ses choix ont été remis en question, mais il reste très indépendant dans son attitude."
C’est difficile de garder une attitude comme la sienne dans un pays comme le nôtre…
"Les Diables Rouges, c’est la complexité de la complexité du sport. C’est pourquoi il m’impressionne. Je n’ai jamais vu un coach aussi calme et réfléchi. Il écoute et est attentif à ce qui l’entoure. Le cas Nainggolan est la preuve d’une chose : Roberto Martinez est dirigé par certaines valeurs dont il ne s’écarte pas. Cela se voit dans ce qu’il dit. Et c’est de cette manière qu’il a géré ce qui s’est passé avec Nainggolan. Il ne se contredit jamais."
Il a également ramené la famille dans le cadre de l’équipe nationale…
"J’ai toujours eu des idées très claires sur la vie de famille et je n’ai jamais compris pourquoi elle devait être séparée du joueur dans une grande compétition. Isoler une personne de son milieu signifie des tensions. Je suis content de voir que le dialogue a amené à cette décision d’intégrer la vie de famille à celle de l’équipe."
"Wilmots pensait tout savoir sur le haut niveau"
Durant tout le règne de l’ancien sélectionneur, il n’était pas question de travailler avec un psy.
"Il est impensable de travailler sans kiné ou sans médecin. Mais ce qui mène un athlète à prester même dans des circonstances difficiles, c’est le mental. Et souvent, il n’y est pas."
Jeff Brouwers sous-entend qu’un psychologue permet de contrebalancer ce souci mental. "Il faut un bon sens de la psychologie. Souvent, les entraîneurs pensent maîtriser cela."
C’était, par exemple, le cas de Marc Wilmots qui a refusé de travailler avec vous…
"Il ne voulait pas d’un psy dans son staff. Selon moi, la psychologie a une place prédominante dans le sport de haut niveau. Marc Wilmots disait avoir suivi sa licence pro. Il pensait que son après-midi de cours sur la question lui avait permis d’en savoir assez. Il pensait qu’être un ancien footballeur de haut niveau suffisait. Dans le sport, l’expérience prend souvent le dessus sur la science."
Il utilisait son expérience dans le football comme explication ?
"Quand on a été sportif pro, on pense tout savoir sur le haut niveau. Mais ce n’est pas vrai."
Que pouviez-vous lui apporter ?
"Après une mauvaise prestation, un sportif doit souvent répondre à la question ‘pourquoi ça n’a pas été ?’ Beaucoup ne savent pas y répondre. Ce n’est pas normal. Quand je vois un athlète que j’accompagne réaliser un résultat, je sais comment il a réussi. Cela s’explique par des détails."
De nos jours, tout le monde est un peu coach. N’est-ce pas devenu un souci ?
"C’est clair. Dans le haut niveau, un entraîneur qui coache doit en partie être une sorte de coach mental. Et beaucoup n’ont pas l’expertise pour travailler l’aspect psychologique du coaching. Ils n’en ont pas l’expérience. C’est comme tous ces coachs qui traitent le burn out. Cela a scandalisé beaucoup de psychologues car un burn out est un cas très difficile à gérer qui demande une connaissance de la psychologie humaine."