Le plus gros danger: la chatte à DD
En France, on considère que Didier Deschamps a la chance de son côté. Au point de lui avoir créé un animal quelque peu trivial.
- Publié le 09-07-2018 à 21h19
En France, on considère que Didier Deschamps a la chance de son côté. Au point de lui avoir créé un animal quelque peu trivial.
Mardi soir, le principal adversaire de la Belgique ne sera pas nécessairement Antoine Griezmann, Kylian Mbappe ou N’Golo Kante, mais bien quelqu’un de plus dodu, à la peau bleue et au sourire trompeur. C’est, du moins, de cette façon qu’a été représentée la désormais célèbre chatte à DD. Cette expression, quelque peu triviale, désigne la bonne étoile sous laquelle semble né Didier Deschamps et qui le poursuit depuis ses débuts comme footballeur professionnel et ne l’a pas lâché lors de sa prise de fonction comme sélectionneur des Bleus, il y a six ans déjà.
Dans le paysage footballistique français, tout le monde en convient : l’ancien milieu de terrain peut toujours compter sur un brin de chance lors des grands tournois. "Napoléon disait que pour gagner des batailles, il faut de bons soldats et de la chance. Didier en a toujours eu. Je me demande d’ailleurs si quand il est né, il n’est pas tombé dans un bénitier", déclarait Michel Platini.
Le fameux animal ronronnant a encore frappé lors de cette Coupe du Monde. En novembre dernier, un incroyable concours de circonstances (défaites communes du pays de Galles, de la Suisse, du Chili et du Pérou lors de la dernière journée) avait permis aux Bleus d’obtenir le statut de tête de série lors du tirage au sort. Un atout car ils ont hérité d’un des groupes les plus aisés du tournoi (Australie, Pérou, Danemark). Rebelote en quarts de finale avec une blessure d’Edinson Cavani, forfait, qui a considérablement déforcé l’Uruguay. Sans parler de la suspension de Thomas Meunier, devenu un pion indispensable de la Belgique, pour les demi-finales. "Didier, il a une chance habituelle qui se renouvelle", souriait l’ancien sélectionneur, Raymond Domenech.
Le phénomène n’est pas neuf car Didier Deschamps semble avoir adopté son animal de compagnie depuis de longues années. En 2014, la France pouvait tomber contre les meilleures nations du monde versées dans le premier pot mais avait finalement été placée dans le groupe de… la Suisse, du Honduras (plus faible équipe du Mondial brésilien) et de l’Équateur (grosse surprise de la zone d’Amérique du Sud).
Vingt-quatre mois plus tard, les Bleus avaient emprunté une autoroute jusqu’en demi-finales avec des matches face à la Roumanie, l’Albanie, la Suisse, l’Irlande et l’Islande. Pas de choc face à un gros vu que les Islandais avaient créé la sensation contre l’Angleterre au tour précédent. Comme par hasard. "Et en demi-finales, on prend l’Allemagne qui est privée de Hummels, Khedira et Gomez. Cela reste une équipe de qualité mais quand même moins impressionnante. Cela reste l’éternelle chance du sélectionneur", commentait José Anigo, l’ancien directeur sportif de Marseille. Et en finale, Cristiano Ronaldo avait quitté le terrain au bout de quelques minutes, sans que cela ne permette à DD de soulever la Coupe.
Cette chance ternit quelque peu l’image de Didier Deschamps. Ses détracteurs considèrent qu’il n’arrive pas à tirer la quintessence de son groupe et doit son succès à son fameux animal. "Didier la chatte a emmené la France vers la finale. Parfois, il vaut mieux être chanceux que bon", avait même écrit le toujours très politiquement incorrect Joey Barton sur les réseaux sociaux durant l’Euro 2016.
En privé, le sélectionneur français s’amuserait de cette caricature. Le quotidien L’Équipe aime même placer l’animal dans ses dessins, comme sur la fameuse Une dessinée en mode Tintin, dimanche dernier. Ses soutiens disent qu’il n’avait pas eu de chance lors du tirage au sort des qualifications pour le Mondial 2014, en étant versé dans le même groupe que l’Espagne, mais au moment du tirage, c’était encore Laurent Blanc qui était à la tête des Bleus. "Ce débat ne m’agace pas… car rien ne m’agace. La chance fait partie du sport et je préfère l’avoir avec moi. On me parle des tirages au sort mais je n’ai pas d’influence sur les boules. Je prends ce qu’on me donne. Mais il ne faut pas que cette question occulte tout le travail réalisé par le staff. Car le foot, ce n’est pas du hasard", commente-t-il.
Quarts de finale de Coupe du Monde (2014), finale d’Euro (2016) et donc demi-finales de Coupe du Monde (2018) : Didier Deschamps n’a pas obtenu tous ces résultats grâce à Madame Soleil Mais on espère quand même que sa chatte ne va pas griffer les Diables Rouges…
De la chance mais (heureusement) pas que ça
La baraka l’accompagnait déjà au tout début de sa carrière professionnelle.
Didier Deschamps n’a pas été touché par la baraka au moment de son arrivée en équipe de France. Durant la saison 1990-1991, Bernard Tapie décide de le prêter aux Girondins de Bordeaux et Marseille perd, quelques mois plus tard, la finale de la Ligue des Champions aux tirs au but. Une épreuve où la chance prend une place prépondérante. Rien ne dit donc que le médian aurait remporté la Coupe aux grandes oreilles deux années plus tard si l’OM avait mieux négocié sa première finale.
Lorsqu’il a commencé sa carrière d’entraîneur principal, il est parvenu à emmener Monaco jusqu’en finale de cette même compétition européenne.
Un exploit incroyable, même si le début de son parcours avait été facilité par le tirage au sort avec des matches face au PSV Eindhoven, au Deportivo La Corogne, l’AEK Athènes et le Lokomotiv Moscou, avant d’enfin se corser avec des sommets contre le Real Madrid et Chelsea. Où, là, la chance n’est pas intervenue, mais uniquement sa capacité à déjouer les plans tactiques d’adversaires réputés plus costauds.
Toutefois, résumer son succès à cette simple chatte serait un raccourci bien trop simpliste. Didier Deschamps est toujours parvenu à tirer le maximum des joueurs qu’il a côtoyés, et cela ne peut pas être simplement en raison de la chance. Sans quoi il aurait déjà gagné plusieurs fois au Lotto...