Ari Skulasson: "Hazard aura un jour le Ballon d’Or"
Ari Skulason, joueur de Lokeren, est fan des Diables Rouges, qu’il affronte ce jeudi soir.
- Publié le 15-11-2018 à 08h18
- Mis à jour le 15-11-2018 à 13h06
Ari Skulason, joueur de Lokeren, est fan des Diables Rouges, qu’il affronte ce jeudi soir. "C’est déjà jeudi ? Waouh. Bon, j’espère qu’on vivra un chouette match." Ari Skulason se marre quand on lui rappelle qu’il affronte la Belgique quelques jours après notre entretien. "Ce ne sera pas une première en Belgique pour moi mais, la dernière fois, c’était en match amical et je suis resté sur le banc."
En tribune, il n’aura presque jamais eu autant de supporters. Sa femme et ses enfants pourront enfin le voir avec la vareuse de l’équipe nationale islandaise sans devoir retourner au pays ou voyager loin. "Ce sera génial d’avoir la famille au stade. Mes enfants soutiendront enfin l’Islande car ils sont fans de la Belgique. Ils parlent d’ailleurs mieux néerlandais qu’islandais… Je n’aime pas ça."
L’Islandais éclate de rire. S’il a aussi appris le néerlandais depuis qu’il est à Lokeren, il n’en est pas moins un Viking dans le sang. Casquette vissée sur sa crinière blonde et boîte de snus (une poudre de tabac à placer entre les dents et la gencive, très populaire en Scandinavie) posée devant lui, il a déclaré son amour pour son pays d’adoption. Pour son équipe nationale du moins.
Que pensez-vous des Diables rouges ?
"Pour l’instant, c’est la meilleure équipe au monde. J’aime la voir jouer."
Qu’appréciez-vous dans son jeu ?
"Roberto Martinez a trouvé un système qui permet de jouer verticalement et de garder le ballon. La France est du même style. Pour avoir affronté les deux, ma préférence va à la Belgique. J’ai suivi tous leurs matchs à la Coupe du monde et j’ai vu beaucoup de matchs avant. J’adore vraiment cette équipe."
Que devrez-vous faire pour gagner ?
"La Belgique évolue à haut niveau depuis des années. Il faut qu’on soit dans un grand jour et que les Belges aient un gros off-day ."
En plus, vous n’avez pas la motivation vu que vous êtes déjà assurés d’aller dans le groupe B de la prochaine Nations League…
"Pas besoin de source de motivation. En équipe nationale, on est toujours à bloc. Un stade plein, un grand adversaire. Moi, ça me suffit amplement pour me donner à fond."
Qui est le joueur qui vous épate le plus dans le groupe ?
"Hazard, c’est le meilleur. L’un des meilleurs au monde, même."
Le voyez-vous Ballon d’or ?
"Pas cette année, mais il l’aura un jour. Tant que Messi et Ronaldo sont là, ils se le partageront. OK, ils n’ont pas fait une grande Coupe du monde mais, pour moi, le Ballon d’or n’est pas qu’une question de résultat, mais juste de qualité. Sinon, Mbappé a aussi fait une année fantastique."
Hazard, Messi ou Ronaldo. Qui a été votre adversaire le plus compliqué ?
"Le meilleur que j’ai croisé, c’est Bale. Il jouait sur la droite. Il va tellement vite !"
Et Eden Hazard ?
"Il est assez proche de Messi dans sa capacité à garder le ballon. Impossible de lui prendre."
Analysez-vous les images de vos adversaires, surtout quand ils ont des noms aussi ronflants ?
"Des joueurs pareils, je les connais bien. J’aurai Meunier face à moi dans le couloir. Et je sais qu’il court tout le temps. C’est le premier dans le rectangle adverse et le premier à être revenu. Il fait 40 km par match, ce mec. C’est une machine. Je lui ai demandé la dernière fois comment il courait autant. Des gars comme Hazard, tu peux regarder 100 vidéos d’eux et ils parviennent quand même à passer. Ils sont tellement imprévisibles qu’ils trouvent une solution sur le moment. Hazard, par exemple, il va de 0 à 100 en un pas et vice-versa. On ne sait jamais ce qu’il va faire. Il est juste très fort."
Vous dites avoir bien suivi la Coupe du monde des Belges. Pensiez-vous qu’ils méritaient mieux ?
"Je pense que la Belgique a fait un moins bon match en demi-finale et c’est tout. Le reste a été fantastique. Si tu ne considères que le niveau footballistique, la Belgique devait battre la France. Mais la France a été très intelligente. Pas que contre les Belges, sur tout le tournoi. Ils sont costauds en contre, doués devant et bien organisés. La troisième place de la Belgique est un énorme pas en avant pour le pays. D’autres succès viendront. L’équipe est jeune et, si les cadres restent en forme, cela va faire encore plus mal."
La France a gagné en jouant, toutes proportions gardées, comme l’Islande…
"Quand tout se joue sur un match, l’organisation est capitale. Parfois, être plus défensif paie. Le football a évolué et a mis l’organisation, la vitesse et le physique en avant. La France savait que, si elle jouait offensivement, elle prenait quatre ou cinq buts contre les Belges."
"Le match aller est inadmissible"
L’Islande est reléguée en Nations League, mais compte se qualifier pour l’Euro 2020.
L’Islande fait rêver depuis son odyssée à l’Euro 2016. Un parcours fou, un public dingue. Tout ça pour une population trois fois inférieure à celle de… Bruxelles. Les hommes d’Erik Hamren n’obtiennent plus de résultats équivalents à leur quart de finale français, mais poursuivent un développement lancé à la base de football. "Personne ne nous attendait à un tel niveau aussi longtemps" , explique Ari Skulason, défenseur gauche de l’équipe nationale d’Islande. "Il y a déjà 6 ou 7 ans que nous faisons un gros boulot. On ne peut pas éternellement être dans le top 10 mondial. Il y a eu des creux. C’est logique. Nouveau coach, nouvelles règles, quelques blessures… Ce ne sont pas des excuses, mais ça explique certaines choses. On reviendra, c’est sûr."
Pourquoi en êtes-vous si certain ?
"On revient toujours. On a de bons joueurs qui sont dans la meilleure forme de leur vie. On croit en ce que l’on a mis en place."
Pour la Nations League, en revanche c’est mort : l’Islande va descendre en Ligue B.
"Nous avons joué deux gros adversaires et personne ne nous imaginait en tête du groupe. Notre place est logique. Les résultats des deux premiers matchs sont toutefois inacceptables."
Que s’est-il passé en Suisse (6-0) et face à la Belgique (0-3) ?
"C'était la loi de Murphy en Suisse. Tout ce qui pouvait mal se dérouler est arrivé. C’était comme ça. Nous prenions toujours la mauvaise décision contre la Suisse. Puis, face aux Belges, nous avons encaissé deux buts que l’on n’a pas l’habitude de prendre. Et 0-2 contre les Belges, c’est difficile à remonter."
Pensez-vous que l’équipe a besoin de sang neuf ?
"Tout le monde parle de fin de cycle mais nous voulons leur montrer que ce n’est pas le cas. Il faut juste savoir gérer la transition. Il y a certains jeunes qui montent en puissance. À eux de se montrer. On espère qu’il n’y aura pas de creux derrière nous."
Le vivier est-il assez profond ?
"Notre force est d’avoir gardé la même équipe ou presque depuis plusieurs années. À l’Euro, nous avons toujours débuté avec le même 11 de base. Tout le monde se connaît et connaît son rôle. Les blessures de certains cassent un peu l’équilibre. Et on n’a pas votre luxe pour les remplacer. En Belgique, si De Bruyne est out, Tielemans ou Dembelé est aligné. Vous avez tellement de choix. Quand on a un cadre blessé, c’est dur d’avoir une option équivalente."
Ne devez-vous pas apprendre à jouer plus offensivement pour franchir un cap ?
"Notre force reste la défense et l’organisation. Devant, les gars savent marquer à la moindre occasion. C’est le secret. Le but avec le nouveau sélectionneur est d’aller de l’avant. Mais donnez-nous du temps. On ne peut pas balancer nos habitudes et notre structure pour d’un coup devenir une équipe offensive. La Nations League est aussi, en cela, un bon laboratoire."
Y a-t-il assez de qualités offensives ?
"Nos meilleurs joueurs sont offensifs. Finnbogason, par exemple, enfile les goals comme des petits pains au petit-déjeuner. On n’a pas le plus beau football mais on a réussi à être efficaces. On doit garder ça."
Sentez-vous que vos adversaires peuvent plus facilement prévoir ce que vous allez mettre en place ?
"Nous sommes devenus plus faciles à contrer. Notre style est moins surprenant. Les équipes nous étudient. Avant, quand une grande équipe venait en Islande, elle ne faisait attention qu’à elle, pas à nous. Ça a changé. Je prends ça comme une marque de respect."
Vous déclariez avant le Mondial que vous étiez une équipe difficile à battre…
"C’est toujours le cas. Nous ne sommes pas faciles à affronter. Qui sait ce qui se serait passé si la Belgique n’avait pas marqué rapidement. Les Pays-Bas ont eu ce souci de concrétisation et ont paniqué."
Sentez-vous un engouement au pays ?
"Les gens en veulent plus et l’équipe a encore faim de faire mieux. Retourner à l’Euro est notre objectif."
"Pas de latéral gauche? Si, Chadli"
Ari Skulason évolue au poste de latéral gauche. Un profil que les Diables ne possèdent pas. Il coupe au moment de cette remarque. "Si, vous avez Chadli ! Il est super bon. Il m’a impressionné lors de la Coupe du monde et a fait un super job. Avec sa puissance et sa vitesse, il est le choix criant pour ce poste à gauche. Il a beaucoup évolué ces dernières années. Avec Meunier de l’autre côté, ça court partout."