Timothy Dupont: "J’ai une belle marge de progression"
À 30 ans, Timothy Dupont découvre le Tour où il espère créer la surprise.
- Publié le 13-07-2018 à 11h17
À 30 ans, Timothy Dupont découvre le Tour où il espère créer la surprise. Le 27 juillet, il y aura dix ans qu’un coureur belge n’a plus enlevé une étape du Tour dans un sprint massif. Trouvera-t-on ces prochains jours, un successeur à Gert Steegmans vainqueur sur les Champs-Élysées en 2008 ?
Même si, Edward Theuns est désormais libéré de sa mission de poisson-pilote de Michael Matthews, le Belge qui peut le plus espérer s’imposer dans un sprint est Timothy Dupont. Pour beaucoup de ceux qui n’ont pas l’habitude de suivre toute la saison, malgré ses trente ans bien sonnés, le Flandrien est un inconnu. Car le coureur qui vit depuis deux semaines à Gistel, près d’Ostende, après avoir longtemps habité à Bredene, a eu un parcours atypique.
"Mes deux premières années chez les espoirs, ça allait encore", raconte le coureur de Wanty-Groupe Gobert. "Mais j’ai rapidement travaillé. D’abord un an chez Carglass, puis une autre année comme électricien. Je roulais encore, mais je travaillais parfois dix, douze heures par jour, voire plus. J’ai construit ma maison précédente à Bredene. J’ai reçu deux mains pour travailler (il les montre)."
Le Flandrien a aussi deux jambes et pas n’importe lesquelles.
"Ma carrière était entre parenthèses, j’étais jeune, je sortais, je buvais une bière de temps en temps", sourit-il. "J’ai vraiment réfléchi, je me suis remis en question, j’ai commencé à plus m’entraîner, j’ai regagné des courses. J’étais déjà élite sans contrat. J’avais 24 ans, j’ai récupéré un contrat pour intégrer l’équipe Jong Vlaanderen, le vivier de Topsport."
Dupont se met alors à collectionner les bouquets, essentiellement dans des kermesses.
"J’ai gagné pas mal de courses, 13 en 2011, puis 19 l’année suivante, parmi lesquelles le Championnat de Belgique à Wielsbeke", dit-il. "Pourtant, personne ne m’a offert de contrat avant que Roubaix-Lille Métropole ne m’en donne l’opportunité. Malheureusement, j’ai chuté lourdement en début de saison. Ce n’est qu’en fin d’année qu’on a trouvé que mon bassin avait bougé, ce qui m’avait handicapé des mois durant, et que l’on m’a opéré de la hanche."
Il y a deux ans, Timothy Dupont rejoint l’équipe continentale Vérandas Willems.
"Ça a été le déclic, j’ai vraiment progressé", dit-il. "J’ai changé de régime alimentaire, éliminé l’huile de palme, les pâtes à tartiner spéculoos ou choco, j’ai travaillé avec un entraîneur Kristof De Kegel…"
Et le Flandrien a cumulé les succès. Dix-sept au total qui lui valurent de finir en Roi des vainqueurs 2016. Pourtant, la série doit aussi au hasard.
En mars, à Nokere, Dupont qui n’a alors fait l’étalage de sa pointe de vitesse qu’une seule fois, est prévu pour lancer le sprint du Letton Kruopis. Ce dernier perd sa roue et le Belge joue sa carte. Il s’impose dans la semi-classique Hors-catégorie en battant le sprinter norvégien Halvorsen, qui évolue désormais chez Sky. Le Flamand enchaîne les succès, il se paye le scalp de Fernando Gaviria en septembre au Championnat des Flandres et gagne la Coupe de Belgique, au point que Kevin De Weert a longtemps songé à l’emmener à Doha pour le Mondial.
Timothy Dupont s’est fait un nom avant d’être reconnu. Fin septembre 2016, il dispute l’Eurométropole, quand il subit un ennui mécanique et se retrouve dans un petit groupe. Lars Bak s’approche. "Tu es Timothy Dupont ?", dit le coureur de Lotto-Soudal. "Désolé, mais j’ai l’ordre de ne pas rouler avec toi."
Il poursuit son ascension. En 2017, son équipe obtient une licence procontinentale.
"L’an dernier, cela a été dur de confirmer notamment à cause des nombreux problèmes de vélos que nous avons eus et que tout le monde connaît", explique celui qui quittera l’hiver dernier l’équipe reprise par Nick Nuyens avec lequel le courant ne passait absolument pas. "Chez Wanty-Groupe Gobert, cela ne va pas mal. Avec Andrea Pasqualon, pour les sprints en côte, et moi sur le plat, on se partage les tâches. Je ne crois pas être le meilleur sprinter belge, mais je suis rapide. J’ai battu beaucoup de grands sprinters, quasi tous. Ce Tour est le plus grand événement de ma carrière, quand je songe où j’étais il y a trois ans. Je savais que je pourrais réussir à me classer parmi les dix premiers, je sais que je peux finir parmi les cinq premiers d’une étape. Gagner ? Pourquoi pas ? Il ne faut jamais dire jamais. Avec de la chance, tout est possible dans un sprint, mais, d’abord, il faut les jambes."
Le coureur de Wanty-Groupe Gobert avoue ses objectifs.
"Je veux arriver à Paris, ça me semble accessible", dit-il. "Ma préparation au Tour a été bonne. J’ai bien travaillé, je suis allé en stage en altitude à Livigno, puis j’ai encore passé deux semaines dans une tente hypoxique. Je n’ai pas peur de la haute montagne, je l’ai découverte en Romandie, je grimpe sans problème contrairement à d’autres sprinters. En plus, j’ai perdu trois kilos, sans perdre de force. Mes tests de sprinters sont bons. Ce ne sont pas des chiffres fous, mais, compte tenu que je pèse 70-71 kilos, mon rapport poids-puissance est très bon. Greipel a dix kilos de plus que moi…"
Après quelques jours, Timothy Dupont a pu se faire une idée sur ses rivaux.
"Gaviria est vraiment fort et il a une équipe exceptionnelle", dit Dupont. "Lui et Groenwegen sont les plus rapides, mais le Néerlandais n’a pas encore eu de chance. Moi, j’ai une belle marge de progression, le Tour va me faire grandir. J’ai disputé longtemps des petites courses, aujourd’hui des grandes. Je suis plus fort chaque année, d’autant que je ne m’entraînais pas beaucoup auparavant. En général, je me sens de plus en plus fort dans une course par étapes, même si je n’en ai jamais disputé une de trois semaines, mais je suis très confiant."
Timothy Dupont Wanty-Gobert 30 ans en 7 dates
1987 Timothy Dupont naît à Gand, le 1er novembre.
2008 Le Flandrien, alors espoir, met sa carrière entre parenthèses en travaillant.
2010 Il a déjà 22 ans, quand il intègre l’équipe Jong Vlaanderen.
2014 Dupont passe pro chez Roubaix-Lille Métropole mais chute lourdement à Kuurne-Bruxelles-Kuurne.
2016 Arrivé chez Vérandas Willems, il devient, avec 17 succès, dont Nokere Koers et Koolskamp, le Roi des victoires. Il gagne la Coupe de Belgique.
2018 Il est transféré chez Wanty-Groupe Gobert.
2018 Le 7 juillet, il débute au Tour par une 12e place dans la 1re étape, deux Top 10 suivront