Thomas: "Non, je n’ai pas gagné le Tour"
Vainqueur à l’Alpe d’Huez, Geraint Thomas renforce son maillot jaune mais ne crie pas victoire
- Publié le 20-07-2018 à 06h35
- Mis à jour le 20-07-2018 à 07h55
Vainqueur à l’Alpe d’Huez, Geraint Thomas renforce son maillot jaune mais ne crie pas victoire D’un autre coureur et surtout dans une autre situation, on devrait ou pourrait crier à une course finie. À un Tour plié, même s’il reste encore neuf étapes, dont cinq ou six vont sans doute provoquer des écarts.
Car Geraint Thomas a déjà 32 ans et son passé dans les grands tours ne plaide pas totalement pour un futur succès (en douze participations, il n’a jamais fini mieux que 15e) et le Gallois précède le leader de son équipe, quadruple vainqueur du Tour, désormais de 1:38. Son premier vrai rival, Tom Dumoulin, pointe à 1:50 !
Le coureur de Cardiff est le premier maillot jaune à s’imposer au sommet mythique de l’Alpe d’Huez où à peine deux futurs vainqueurs du Tour de France se sont imposés quelques jours plus tôt. Dans ces deux chiffres est contenu tout le paradoxe des succès actuels de Geraint Thomas. Un exploit, mais nullement gage de future victoire.
Ce jeudi, pour clore les trois jours passés dans les Alpes où il a accru son avantage sur tous ses rivaux, parfois de peu, mais souvent de beaucoup, le lieutenant de Christopher Froome s’est débarrassé un peu plus encore de sa livrée de domestique. Même si lui affirme toujours que son équipier reste le chef de file d’une équipe Sky qui maîtrise la situation quasi à merveille.
"Non, je n’ai pas gagné le Tour aujourd’hui", avoua le maillot jaune. "Je veux juste apprécier cette victoire qui est incroyable, je ne pensais jamais m’imposer ici. Je ne peux y croire. Ce succès m’a laissé sans voix. Gagner à l’Alpe d’Huez ! Quand, j’ai franchi la ligne, je me suis dit : ‘Cela ne peut pas être vrai, je rêve, il y a sûrement un gars qui est resté devant.’ Malgré cela, Chris Froome reste notre leader. Il est sans doute le plus grand de tous les temps. Il offre des garanties sur trois semaines. Moi, sur un jour, je peux tout perdre. On ne sait jamais comment le corps va réagir, le Tour est si dur. Moi, je suis si heureux après mes deux succès et ces jours en jaune."
cependant, comme la veille, les hommes de Dave Brailsford ont été attaqués, mis en difficulté, par Alejandro Valverde mais, surtout, par l’offensive au long cours de Steven Kruiswijk, admirable d’audace et qui aurait mérité pour son panache de mettre fin à un bail de… 29 ans sans succès d’un Néerlandais sur la montagne des Hollandais.
Au contraire, l’attaque du coureur de Lotto Nl lui aura fait perdre deux places au classement général. Il n’y a pas de morale. "J’ai l’espoir d’apprécier ma journée en jaune demain (ce vendredi), plus qu’aujourd’hui, poursuivit Thomas. Car l’étape a été vraiment trop dure pour que je prenne du plaisir, même avec le maillot jaune sur les épaules. Kruijswijk nous a mis terriblement sous pression, nous avons souffert quand Movistar et Ag2R ont accéléré dans la Croix de Fer. Kruijswijk a eu le mérite de prendre six minutes d’avance, nous avons dû utiliser dans la vallée tous les équipiers qui nous accompagnaient pour réduire notre retard et il a tenu jusqu’à quatre kilomètres du sommet. J’ai mené le train pour une attaque de Chris, mais Dumoulin et Bardet nous ont devancés. Après tous ces faits de course que je gagne sont pour moi une énorme surprise."
Thomas aurait pu aussi se retrouver au sol, comme l’infortuné Vincenzo Nibali. "Je le suivais mais n’ai pas vu pourquoi il est tombé, il attaquait et Froome aussi, quand il est tombé", disait encore le Gallois. "J’ai dû sortir mon pied de la pédale pour l’éviter. Une telle situation, provoquée par le public ou un motard, n’est pas bonne pour la course. Sans cette chute, Nibali aurait lutté pour gagner l’étape."
Il y a trois ans , à trois jours de l’arrivée à Paris, Geraint Thomas pointait à la 4e place du classement général mené par Chris Froome. Dans l’étape de La Toussuire, le Gallois avait encaissé une terrible défaillance, perdu 22 minutes et reculé à la 15e place. "Je le redis", répète depuis des jours le Britannique. "Pour moi, la troisième semaine est une inconnue, j’espère que je vais tenir mais la grande différence, c’est, qu’à l’époque, je faisais beaucoup de travail tous les jours pour Froome et je ne pensais absolument pas au classement général. Cette fois, j’étais libre pendant les neuf premières étapes, je n’ai pas fourni de gros efforts. Lui a gagné six grands tours, on connaît ses qualités d’endurance, moi, que je sois là, nous donne seulement une autre carte à jouer."