Les confidences de Guillaume Martin: "La philo m’aide en dehors du vélo, pas sur le vélo"
Le master en philosophie de Guillaume Martin lui permet de prendre du recul par rapport à la pression du cyclisme.
- Publié le 07-02-2018 à 12h36
Le master en philosophie de Guillaume Martin lui permet de prendre du recul par rapport à la pression du cyclisme. Chaque coureur a son histoire, son parcours. Celle de Guillaume Martin est marquée par ses études et son master en philosophie. Domaine dont il parle avec toujours autant de passion, même s’il ne tient pas à être connu que pour cet aspect. "La philo, c’est avant tout quelque chose de personnel" , précise le leader de la formation Wanty-Groupe Gobert. "Je n’ai pas le besoin de la partager. Ce n’est pas parce qu’on est philosophe qu’on est un extraterrestre et qu’on ne parle que de philo tout le temps… Je discute avec tous les gars de l’équipe. De tout. Comme de l’état de l’agriculture, par exemple, avec Frederik Backaert, car c’est un sujet qui l’intéresse."
La philosophie accompagne au quotidien Guillaume Martin. "La philo peut m’aider en dehors du vélo, dans une attitude générale" , poursuit le Français de 24 ans. "Elle permet de relativiser, de prendre du recul. Peut-être que grâce à elle, je me mets moins de pression que d’autres coureurs… Mais sur le vélo, ça ne me sert à… rien. Peut-être même que cela me dessert : à trop vouloir analyser, on oublie d’être dans l’action… Mais, justement, ce que j’aime dans le vélo, c’est qu’on est tout entier dans l’action. À tel point qu’on ne se pose plus de question… On est là, dans l’instant, on sent qu’on vit avec toute cette adrénaline qui est déclenchée par l’activité physique. Le vélo, le sport, c’est comme une… contre-philosophie."
Avec le Français, la conversation est toujours riche. Et l’expression la tête et les jambes, bien connue du jargon des sportifs, prend tout son sens avec lui. "Même si, pour moi, dans ma conception philosophique de l’homme, il n’y a pas d’un côté le corps et de l’autre l’esprit" , nuance le Normand. "Il n’y a pas d’un côté la tête et de l’autre les jambes. Dans le vélo, la souffrance et le plaisir s’unissent. Il y a une part de sadomasochisme dans le cyclisme, ou dans les sports d’endurance qui sont à la mode actuellement, comme le jogging, le marathon, le triathlon… Les gens prennent du plaisir à souffrir. Cela révèle un état de la société, dans laquelle on cloisonne tellement les choses. On bride tellement le corps qu’il a un grand besoin de s’exprimer par ailleurs. En réaction par rapport aux journées passées au bureau, le corps a besoin d’exulter et c’est pour ça, je pense, qu’il y a tous ces sports qui se développent. Les corps ont besoin de s’exprimer."
Et le sien, Guillaume Martin compte continuer à l’exprimer tout au long de la saison.
"Envie d’aller plus haut" Après sa solide saison 2017, Guillaume Martin est logiquement courtisé, lui qui arrivera en fin de contrat à l’issue de la saison. "Je me sens bien chez Wanty-Groupe Gobert et j’aime l’idée de grandir avec cette équipe" , explique-t-il. "Je suis arrivé dans cette formation en étant un coureur en devenir, à l’époque où l’équipe était, elle aussi, en devenir. On grandit dans le même rythme; cela rend cette aventure belle. Si cela continue comme ça, il n’y a pas de raison que j’aille voir ailleurs. Mais j’ai envie d’aller voir plus haut. Si c’est chez Wanty Groupe Gobert, c’est parfait. Maintenant, si je prends un peu d’avance par rapport à l’équipe (NdlR: qui a l’ambition de monter à court terme en World Tour), je serai peut-être amené à changer de formation, mais pour l’instant, cela ne me préoccupe pas. Je suis concentré sur ma saison."
"J’ai franchi un cap"
Le Tour de France l’a rendu plus fort physiquement.
Il a bien entamé la saison, Guillaume Martin. Le leader de la formation Wanty-Groupe Gobert a fini cinquième de la Marseillaise, dans le bon groupe de tête, avec son coéquipier norvégien, le très prometteur Eiking (qui finit deuxième). Le Français a directement confirmé sa solide fin de saison 2017. Une année marquée par cinq victoires, et pas des moindres, avec le Tour de Toscane ou une étape du Tour du Limousin, et ses bons débuts au Tour de France, qu’il a terminé 23e.
"Sur l’ensemble de ma saison 2017, je suis assez satisfait , commente-t-il. Je suis en progression constante depuis mes débuts pros. À chaque début de saison, je ne sais pas jusqu’où je peux aller. J’espère juste faire mieux à chaque fois."
Physiquement, il sent que le Tour de France lui a permis de franchir un cap. "Oui, et cela s’est vu dans les victoires qui sont arrivées dans la foulée , continue Guillaume Martin. Trois semaines de course au plus haut niveau, ce n’est pas anodin. Après le Tour, j’ai su mettre une dent de moins (NdlR : et pédaler avec plus de puissance). Cela m’a donc changé. Le Tour, ça change. Notamment au niveau de l’attention médiatique."
Après avoir abordé le Tour 2017 dans un esprit de découverte, quelle sera son approche de la Grande Boucle 2018 ? "La grande question pour moi sera de savoir si je me concentre à 100 % sur le classement général ou si je me laisse une part de liberté pour aller dans les échappées , répond-il. Je pense qu’une réponse sera apportée naturellement après la première semaine de course, qui promet d’être assez piégeuse. Ce qui est certain, c’est que je ne vais pas faire exprès de perdre du temps au début…"