Les 12 temps forts de la carrière de Boonen (6/12) | 29 juillet 2007 : le vert lui va tellement bien
Tom Boonen et le Tour de France, c’est une histoire compliquée, faite de haine et d’amour comme quand il a porté le maillot jaune ou enlevé le classement par points.
- Publié le 01-04-2017 à 12h30
- Mis à jour le 02-04-2017 à 12h40
Tom Boonen et le Tour de France, c’est une histoire compliquée, faite de haine et d’amour comme quand il a porté le maillot jaune ou enlevé le classement par points. Dans la garde-robe qu’il s’est constituée au cours d’une carrière prolifique, Tom Boonen peut se prévaloir de voir figurer le maillot jaune. Ce sont quatre maillots, en fait, qu’il porta en juillet 2006 et qui le privèrent sans doute d’un succès d’étape, car Boonen laissa beaucoup de stress dans la défense de la tunique d’or. Un maillot conquis sur le sommet du Cauberg, en s’accrochant malgré une crevaison lente. Quatrième de l’étape, après avoir déjà terminé 13e et 2e des deux premiers sprints.
Boonen pestait à l’arrivée avant d’apprendre après un peu de confusion qu’il pouvait monter sur le podium.
"Un coureur de son statut devait porter le maillot jaune un jour au moins dans sa carrière", dit Patrick Lefevere.
La relation entre la Grande Boucle et le champion du Monde 2005 a toujours été compliquée. Yvan Vanmol, le médecin de la Quick Step, explique pourquoi ce fut le cas.
"Tom présente un hématocrite naturellement bas (NdlR : 39) et donc, dans les grands tours, il finit par s’éteindre petit à petit, dit le docteur. C’est pour cela, mais aussi parce que quelques fois il a chuté et s’est blessé, comme en 2005 où son genou était sérieusement touché, qu’il a rarement été au-delà de deux semaines dans un grand tour. Il avait besoin de récupérer."
Un peu comme une bougie privée d’oxygène…
Des victoires qui ne suffisent plus
En juillet 2007, quand il arrive à Londres, Tom Boonen sort d’un printemps en demi-teinte, lequel succède à deux exceptionnelles saisons qui lui ont permis de réaliser, pour la première, un triplé unique en gagnant le Tour des Flandres, Paris-Roubaix et le Mondial, puis, pour la seconde, de devenir, au printemps 2006, le premier après Louison Bobet, Rik Van Looy et Eddy Merckx à s’imposer au Tour des Flandres avec le maillot arc-en-ciel sur le dos, comme Peter Sagan le réussira l’an passé.
À la fin du mois de janvier 2007, Het Laatste Nieuws publie un dossier incendiaire intitulé Patrick Lefevere, 30 ans de dopage, qui évoque un dopage organisé au sein de la formation belge. Un dossier, basé essentiellement sur des témoignages anonymes ou de témoins peu, voire pas du tout, crédibles, pour lequel le quotidien flamand sera finalement condamné. Une affaire qui fait suite au bras de fer engagé sur ce domaine à l’automne précédent par le sénateur Jean-Marie De Decker et Patrick Lefevere, après des insinuations de l’homme politique flamand qui conduiront celui-ci à être condamné symboliquement.
Boonen gagne pourtant les quatre premières courses de sa saison, les quatre premières étapes du Tour du Qatar, qu’il laisse à son équipier et ami Wilfried Cretskens, mais il est piégé au Circuit Het Volk par Pippo Pozzato. Troisième encore à Milan-San Remo, il poursuit sa moisson des semi-classiques flandriennes, vainqueur à Kuurne, puis à Waregem, dans À Travers les Flandres, et à Harelbeke, au G.P. E3, qu’il enlève pour la quatrième fois de suite en prenant, cette fois, la mesure de Fabian Cancellara !
Mais pour la première fois depuis trois ans, il ne joue pas les premiers rôles dans les deux grands monuments pavés. Au Tour des Flandres, il tombe en début de course stupidement, parce que ces pompiers ont arrosé la chaussée devant leur caserne, et ne peut réagir quand Alessandro Ballan et Leif Hoste prennent la clé des champs au Mur de Grammont. Il n’est que 12e et fait à peine mieux (pour lui) la semaine suivante sur les pavés de l’Enfer du Nord, 6e.
"Tout le monde attend chaque fois que je remporte le Tour des Flandres ou Paris-Roubaix, voire les deux, dit-il après la Reine des Classiques, mais ceux qui connaissent un peu le cyclisme savent que cela ne se passe pas comme ça, qu’on ne gagne pas sur un simple claquement de doigts."
Un train proche du déraillement
Le Tour de France lui offre une occasion de se racheter. Mais son début est lui aussi perturbé. Le deuxième jour, à Canterbury, il est victime d’un problème mécanique et ne peut rien contre le formidable rush de Robbie McEwen, transcendé par l’adrénaline après une chute survenue à dix kilomètres de l’arrivée. Qu’à cela ne tienne, tout le monde pense que Tom Boonen va prendre sa revanche à Gand.
Le 9 juillet, il lève en effet le bras en franchissant la ligne, un sourire aux lèvres, mais c’est pour saluer le succès de son équipier Gert Steegmans et le doublé de sa formation.
"Cela me fait plus plaisir que si j’avais gagné", répond l’Anversois à tous ceux qui cherchent à attiser le feu et parlent de trahison de Steegmans, censé lui emmener le sprint. D’autant que les défaites s’accumulent. Il est 4e à Compiègne, où Fabian Cancellara a surpris tous les sprinters pour gagner en puncheur, le maillot jaune sur les épaules. Puis, il finit 8e, seulement, à Joigny, où il a perdu la roue de Gert Steegmans, lui-même 6e. Le train des Quick Step est proche du déraillement. Ça commence à grincer des dents quand Boonen cède le maillot vert à Zabel au soir de la 5e étape où le Belge, 99e, n’a même pas sprinté !
Le Néerlandais Steven De Jongh était de la partie, chez Quick Step, cette année-là. L’ancien poisson-pilote de Tom Boonen, devenu directeur sportif de Contador chez Trek, se souvient.
"Nous avons eu, Tom surtout, beaucoup de malchance les premiers jours même si Gert avait gagné à Gand, se rappelle l’ex-vainqueur du G.P. E3 et de Kuurne (deux fois). On ne s’est jamais affolé pourtant et Tom encore moins que les autres. Ça a duré avant qu’il ne trouve l’ouverture, mais mieux vaut tard que jamais."
Le vendredi 13 juillet, Boonen tourne le dos à la malchance et gagne enfin, à Bourg-en-Bresse, où il jette son vélo sur la ligne pour s’imposer, deux ans et neuf jours après sa dernière victoire sur le Tour. Il reprend le maillot vert, qu’il ne lâchera pas, d’autant qu’il ajoute un autre succès à sa série, à Castres, au terme de la 12e étape. Au total, il aura gagné six étapes sur les routes de France.
"Ce Tour 2007, c’est un super souvenir, dit encore De Jongh. Finalement, ça a bien marché pour nous. Tom a gagné deux étapes, Gert une autre et Cédric Vasseur une quatrième fois à Marseille. L’ambiance dans le groupe était superbe, et j’ai même eu l’impression que le Tour filait vite cette année. Ce maillot vert, ça a ajouté un peu de prestige à sa carrière. Le Tour, c’était difficile pour lui. à cette époque, il y avait beaucoup de top-sprinters qui se focalisaient sur ce maillot vert, Zabel, McEwen, O’Grady, Hushovd, Freire… Tom, lui, avait déjà couru toutes les classiques du printemps au plus haut niveau, avec beaucoup de pression et de stress."
Steven De Jongh évoque cette époque avec nostalgie.
"On a roulé quatre fois le Tour ensemble, sourit-il. J’étais le plus souvent le dernier homme, parfois, on changeait avec Gert Steegmans. Tom avait une confiance aveugle en moi, il savait que je le déposerai au bon moment, au bon endroit."