Le papy du peloton pro a… cinquante-deux ans !
- Publié le 06-11-2018 à 18h36
- Mis à jour le 07-11-2018 à 14h32
Le Néerlandais Lex Nederlof, actif dans une équipe continentale basée au Laos, est le plus vieux coureur pro du monde Si une barbe naissante aux légères notes poivre et sel n’était là pour servir de maigre indice, il serait bien difficile de donner un âge à Lex Nederlof. Derrière sa silhouette affûtée et son teint perpétuellement hâlé, le Néerlandais est pourtant le plus vieux coureur pro du monde à un peu plus de… 52 ans !
Actuellement engagé sur le Tour De Singkarak, en Indonésie, où il occupe la 55e place d’un classement général emmené par l’Australien Jesse Ewart (24 ans), le natif de Oostvorne est le capitaine de route de la formation Nex CCN.
"Il s’agit d’une équipe continentale évoluant sous licence laotienne que j’ai moi-même construite, nous explique Lex Nederlof. J’en suis le manager officieux. CCN est une marque spécialisée dans le textile sportif pour laquelle je suis ambassadeur en Thaïlande, où j’habite, et aux Pays-Bas. Mon salaire est très loin des normes européennes, mais il me permet de payer mes factures, comme la vie n’est pas très chère dans cette région d’Asie, et surtout de continuer à vivre de ma passion. Évoluer sur des épreuves labellisées UCI à plus de 50 piges demeure un privilège dont je ne me lasse pas ! Si j’avais voulu faire gonfler mon compte en banque, j’aurais choisi une autre voie…"
Un choix de vie que cet ancien stagiaire de l’équipe Superconfex d’Edwig Van Hooydonck a opéré en 2005.
"Après avoir très longtemps mené de front une honorable carrière chez les amateurs et un boulot dans la comptabilité, j’ai eu l’opportunité de quitter mon job à des conditions intéressantes et de vivre intégralement pour le cyclisme : un rêve. À la frontière des années 80 et 90, j’avais vu une place dans le peloton pro me filer sous le nez à la suite d’une chute après avoir disputé le Tour d’Irlande aux côtés de… Sean Kelly et Stephen Roche. J’étais déçu, mais cela ne m’a jamais détourné de mon amour pour le cyclisme. Avec le recul et ce que l’on sait désormais du cyclisme pro des années 90, ce coup du sort me fut même sans doute salutaire. Mais, lorsque l’opportunité de vivre du vélo s’est de nouveau présentée à moi une quinzaine d’années plus tard, j’ai sauté sur l’occasion."
Amoureux de voyages et de découvertes (lire ci-dessous), Lex Nederlof a fait du circuit asiatique son terrain de chasse privilégié.
"Le niveau y est plutôt bon et le cyclisme en réelle expansion. Je cours surtout en Asie du Sud-Est et mon niveau continue de me permettre de faire la course. J’assume, le plus souvent, un rôle de capitaine de route. Il faut dire que j’ai une certaine expérience à faire valoir (rires). Même si je prends soin de mon corps, la passion constitue le principal secret de ma longévité. Le jour où je n’aurai plus envie de monter sur mon vélo pour partir à l’entraînement, j’arrêterai. C’est sans doute un peu bateau comme réponse mais cela colle pourtant parfaitement à mon état d’esprit. Même si mon dos me fait un peu mal le matin, j’espère bien poursuivre l’aventure en 2019 et prendre une licence pour la… 40e année consécutive !"
"Les jeunes coureurs me respectent"
Si l’essentiel de son programme de courses s’articule autour du calendrier asiatique, Lex Nederlof revient toutefois chaque année en Europe pour y disputer certaines épreuves au printemps et au début de l’été. "À cette période, c’est la saison des pluies sur une bonne partie de l’Asie puis, ces dernières années, le ramadan. Je rentre donc alors sur le Vieux Continent et participe d’ailleurs assez régulièrement à des kermesses chez vous, en Belgique. L’ambiance y est tellement fantastique ! " (rires)
Début juillet, il a ainsi disputé le championnat des Pays-Bas réservé aux élites, qu’il a bouclé à la 51e place, à 5:24 du vainqueur Mathieu Van der Poel, son cadet de près de… 30 ans ! "La plupart des pros néerlandais, comme Tom Dumoulin par exemple, me connaissent et respectent ma carrière. Il faut dire que je pourrais être le père d’une bonne partie du peloton..." (rires)
"Une course près du Tibet, à 5.000 mètres d’altitude"
Le Néerlandais a déjà couru dans près de la moitié des pays du globe
Sport itinérant de par sa nature même, le cyclisme semble avoir inoculé le virus du voyage à Lex Nederlof.
"Dans quelques semaines, je disputerai une épreuve au Cambodge, sourit le coureur de chez Nex CCN. Il s’agira du 82e pays dans lequel j’aurai épinglé au moins un dossard. (rires) Même si je tente aujourd’hui de rationaliser au mieux mes déplacements dans le monde, j’aime toujours autant m’ouvrir de nouvelles découvertes. Ma priorité absolue reste toutefois la compétition et je vis donc comme un athlète plutôt qu’à la façon touriste. Le soir d’une épreuve par étapes, je veille d’abord et avant tout à m’offrir un bon massage et à récupérer plutôt qu’à aller me balader en ville par exemple. Chaque course est déjà une fantastique expérience en soi et une découverte… J’ai élu domicile dans le nord de la Thaïlande, près de Chiang Mai, depuis plusieurs années maintenant. Je ne sais toutefois pas vraiment si je peux dire que c’est chez moi puisque j’y ai passé une semaine depuis début mai… (rires) Ma vie tient dans une valise ou presque."
Loin des standards des épreuves européennes, Lex Nederlof explique s’être habitué à de toutes autres normes.
"Ce mardi, sur l’épreuve indonésienne sur laquelle je suis actuellement engagé, nous avions un transfert de 100 kilomètres à réaliser après l’étape que nous avons bouclée en… trois heures. Ici, on n’avale pas les bornes de la même manière que sur une autoroute européenne (rires). Il y a trois ou quatre saisons de cela, je me souviens aussi avoir disputé une épreuve en Chine, près de la frontière avec le Tibet. On avait disputé une étape à plus de 5.000 mètres d’altitude…"