Nos experts donnent leurs impressions sur Manu Lecomte: "Son intelligence fait déjà de lui un joueur NBA!"

Une NBA qui a beaucoup changé en effet et qui fait à présent la part belle aux shooteurs. "J’en parlais avec Evan Fournier (Orlando Magic) : les joueurs peuvent dire merci à Steph Curry car à présent, les dirigeants cherchent des meneurs-ailiers capables de shooter de loin. Manu a l’intelligence du jeu et son shoot est incroyable, enchaîne Duke Tshomba. Tout le monde a vu son match contre Trae Young (où il a marqué 29pts) . LeBron James était là, Curry et Westbrook l’ont regardé. Tout le monde a vu ce dont Manu était capable et je sais qu’il est déjà sur les tablettes de quelques équipes. Maintenant, certains voudront voir ce qu’il peut apporter défensivement mais son intelligence de jeu fait déjà de lui un joueur NBA."

Par contre, le son de cloche est plus nuancé du côté de Jacques Vandescure et d’Alex Biggerstaff. "Il n’est pas un meneur-organisateur comme pouvait l’être un Steve Nash, toutes proportions gardées, lance le journaliste français. Il a une belle carrière NCAA, très régulière mais il ne faut pas oublier qu’il ne joue pas à Duke ou à Villanova. S’il était là-bas avec les mêmes stats, on pourrait parler d’un avenir en NBA. Il est un peu sous-dimensionné et ce n’est pas un énorme défenseur non plus. Maintenant, je lui souhaite le meilleur, bien évidemment."

Quant à Jaques Vandescure, il voit plus Manu comme une potentielle prise de risque d’une franchise. "Il est très bon en collège mais la réalité est souvent différente. Étant donné qu’il a fait un cursus complet, il affronte des gars qui ont moins de maturité et il arrive à faire la différence. En NBA, c’est autre chose mais il a une petite chance d’être drafté si une équipe voit du potentiel en lui et décide de prendre un petit pari sur plusieurs années avec Manu."

"Il a quand même vécu une saison compliquée"

Avec des hauts et des bas, nos experts jugent la saison de Manu Lecomte

Malheureusement pour Manu, son université, Baylor, ne devrait pas participer à la March Madness, le grand rendez-vous du basket universitaire. Un coup dur pour l’exposition de Manu qui s’explique par une saison avec des hauts et des bas. "Je n’ai pas vu beaucoup de matches de Manu avec Baylor cette année mais, malheureusement pour lui, il joue sa saison senior dans une équipe en reconstruction, constate Alex Biggerstaff. Individuellement, il a bien commencé, étant meilleur scoreur de son équipe, mais il a vécu une année compliquée car il était ciblé par les autres équipes."

Malgré tout, Manu Lecomte a eu quelques coups d’éclat, comme lors de son duel face à Trae Young il y a quelques semaines. " Manu a prouvé qu’il faisait partie de ces joueurs capables de changer un match. OK, Young a planté 44 points mais Manu en a mis 29 aussi et Baylor est passé à deux doigts de la victoire. Si ça avait été le cas, on n’aurait même pas parlé de Young mais bien uniquement de Manu même si on n’est pas dans la même catégorie non plus ", précise Duke Tshomba.

Contrairement à un joueur comme Akyazili (Anvers), qui n’a pas percé aux États-Unis, Manu s’est battu pour progresser et se rapprocher de son rêve toute la saison. " Il s’est renforcé musculairement et son shoot à trois points a réellement progressé cette année, note Jacques Stas. Avec sa compréhension du jeu et sa vision, Manu est devenu un joueur très complet, sans oublier qu’il est capable d’aller provoquer de nombreuses fautes pour obtenir des lancers-francs, même contre des gars plus costauds et plus grands que lui. Malheureusement, dans la perspective de se faire drafter, c’est important d’être dans une équipe qui gagne, et Baylor vit une saison compliquée."

Enfin, pour Jacques Vandescure, c’est sur le plan mental qu’il s’est montré le plus impressionnant. " C’est surprenant de voir à quel point il est capable de s’adapter à toutes les situations pour franchir le palier suivant. Après sa saison, il mérite d’avoir sa chance."

"La G-League : une bonne alternative"

Si jamais Manu n’était pas drafté, quelques pistes d’avenir sont évoquées.

Si malheureusement pour Manu, la NBA ne lui ouvre pas (encore) ses bras cet été, ce n’est pas pour autant qu’il restera sur le carreau. "Manu va être payé, quoi qu’il arrive, sourit Duke Tshomba. Pour moi, il peut déjà aller dans un top club en Europe. Pourquoi des Américains qui sortent de l’université pourraient y aller et pas lui ? Il n’y a pas de raison et il a sa place en Euroleague."

Des propos nuancés, une fois encore, par Alex Biggerstaff. "Personnellement, je le vois bien dans le roster d’une équipe de Champions League. Ou peut-être aller chercher du temps de jeu dans un top club belge, voire en Allemagne qui est un championnat qui monte. Je sais que je peux paraître négatif mais il y a tellement de joueurs qui sortent et tellement de facteurs à prendre en compte qu’il est parfois difficile de se faire sa place. De toute manière, je ne pense pas que ce soit réducteur de faire une belle carrière en Europe. Tout est une question d’opportunité."

Et des opportunités, c’est peut-être au sein d’autres leagues, proches de la NBA, que Manu pourrait les trouver s’il n’était pas drafté. "La G-League pourrait lui permettre de rester au contact de son rêve, continue Jacques Vandescure. Il devrait certes sacrifier une saison mais en restant aux États-unis, il reste sous la main et dans le collimateur des agents, des coaches et des scouts NBA. De plus, la G-League a permis à des joueurs comme Hassan Whiteside ou Robert Covington de s’épanouir en NBA. Je lui conseillerais la G-League s’il n’est pas drafté, mais il a sa place n’importe où en Europe."

Pour Jacques Stas, c’est un tournoi en particulier qui pourrait lui servir de tremplin. "Le tournoi de Portsmouth aux États-Unis offre une belle vitrine aux joueurs qui n’ont pas été draftés. C’est une opportunité pour se mettre en valeur devant les general manager des franchises NBA mais également des grosses cylindrées européennes. Tout le monde est présent à ce tournoi et il a permis à certains oubliés de la draft de se faire une place au soleil."

"Manu est le Son Goku du basket belge !"

Le talent de Manu Lecomte ne fait aucun doute chez nos experts.

Si Manu Lecomte est un joueur incroyable, il est avant tout un homme avec beaucoup de qualités. " Manu, c’est le petit frère, lance d’entrée Duke Tshomba. J’ai eu l’occasion de travailler avec lui et c’était un réel plaisir."

Et de tenter une comparaison… surprenante. " Pour moi, Manu Lecomte est le Son Goku du basket belge. C’est quelqu’un de très talentueux qui, comme Son Goku, n’a jamais eu peur de partir pour apprendre et revenir plus fort par la suite. Manu, c’est une éponge, il a soif d’apprendre et contrairement à ce que certains pourraient croire, rien ne lui a jamais été donné. Il s’est battu pour arriver là où il en est !"

Dès son plus jeune âge, Manu a tapé dans l’œil de Duke Tshomba. " Je suis le parcours de Manu depuis ce jour où je suis sorti d’un entraînement à l’Atomia. Il n’avait pas de coach, j’étais là, sur place, et je lui ai donné entraînement avec d’autres gars. Quand j’ai vu ce qu’il pouvait faire, c’était incroyable. Et depuis, je n’ai jamais cessé de le suivre."

Tout comme Duke Tshomba, Jacques Vandescure a côtoyé Manu quand il était plus jeune du côté de Bruxelles. " Déjà quand il avait 12-13 ans, il avait des qualités athlétiques, une passion et un engouement bien plus élevé que les autres jeunes. C’est d’ailleurs quelque chose qu’il a gardé intact en lui jusqu’à aujourd’hui et qui lui permet de progresser tous les jours."

On comprend bien que si Manu Lecomte est à deux doigts de devenir le premier joueur belge à être drafté et à rejoindre ensuite la NBA, il le doit à une seule personne : lui-même ! " Dans l’adversité, il n’a jamais baissé les bras et il a toujours fait les bons choix. Et même si beaucoup de personnes essayent de prendre du crédit sur le dos de Manu, s’il en est arrivé là, c’est grâce à son travail et sa persévérance", conclut Duke Tshomba qui ajoute une dernière petite bombe : "En toute honnêteté, je pense que c’est l’un des meilleurs talents que la Belgique ait jamais connu et il a l’opportunité de devenir l’un des meilleurs joueurs de l’histoire du pays !"